Aujourd’hui, je me suis
senti de vous servir bien chaud un petit conte véridique.
J’avoue
que l’expression idiomatique, je me suis senti, courante dans mon midi
de la France semble du petit nègre et,
en ces temps où la bien-disance et la bien-pensance s’étouffent mutuellement,
j’ai aussi voulu rappeler mon origine africaine et mon amour de la langue
française.
Comme
tous les abrutis qui parlent de tout sans jamais savoir rien, avant que
d’avancer dans mon récit j’ai tenu à ce petit aparté en constatant que la nature humaine est xénophobe par nature. Quant au racisme, il y faut une théorie
sur les races et donc c’est « l’intelligence » qui le crée, le met en
œuvre et, une fois en marche, elle ne peut plus l’arrêter. C’est aussi l’intelligence
qui combat la xénophobie... disons plutôt qu’elle l’atténue pour le mieux vivre
ensemble.
Ce
jour j’ai décidé de me faire plaisir en surprenant Fanny qui me tarabuste depuis
de trop nombreuses années pour que je divulgue ce texte. Vingt-six ans qu’elle
attend. Actuellement, elle est en Haïti. Un cadeau à ma doudou.
La
première page du poème, je l’avais déjà déclamée à mon neveu Naïm, l’amoureux des
poètes kabyles et français, rien que la première page. Pas plus.
-Tonton, une copie s’il te plaît !
-Voilà, Naïm. Aujourd’hui, je peux. Rien qu’une
petite partie de la première page.
Donc
je vous servirai un conte véridique… Des sornettes ? Que nenni et que l’on
se rassure : mon récit, une page de mon vécu vous semblera un conte tiré
de mon imagination, mais détrompez-vous. Tout est vrai, sans fioritures. Du
lourd !
C’est
l’histoire d’un long poème qu’on m’offrit, il y a longtemps. Un seul exemplaire
dactylographié. Je pouvais en faire ce que bon me semblait : le signer, l’éditer,
le détruire. Il y a peu, j’ai préféré le rendre à son auteur (féminisez si cela vous chante, moi, ça me gave). A ce jour je ne sais toujours pas s’il a été
édité. C’est encore l’histoire de rapports humains compliqués où l’on se
demande encore à quoi peuvent bien penser les hommes. Et les femmes pensent,
faut le dire…
Allons,
allons Gilou… un nouveau Cantique des
Cantiques ? Certainement. Qu’on en juge par la première page de ce
poème.
Notre
auteur ? Une journaliste. Seule une femme pouvait écrire ces mots :
LES TROIS BAISER D’EVE
Regarde-moi !
Regarde-moi.
Je sens la pluie qui me lisse le cœur et me procure une paix d’émotions. Je te
donne de loin ma lèvre mauve et douce tout embuée de chaud. Regarde-moi.
Attends-moi. J’aspire à te donner ma créature intérieure, ma bête luisante
comme un coin d’aurore, puisque je m’agenouille au-dedans de mon propre ravage,
que je te donne à main nue mon trophée d’aubépine et ma virginité d’arbre fendu
en long. Le gui égoutte ses feuilles dures et je te cerne d’aussi loin que je
peux en oblique de la pluie. Comme je t’ai griffé et comme je bouge encore de
toutes mes ramifications, ton dos, tes reins se souviendront de m’avoir foulée
et tenue par le ventre en travers de l’obscurité.
Il faudrait
raconter. Mais comment t’embarquer à ma suite dans ces commencements
d’aujourd’hui bâclés, dévorés, sans en percevoir tout le suc. On a si peu de
temps qu’il faut s’étreindre avant que d’ouvrir la bouche, s’arracher par lambeaux
un peu de bleu sur la peau, et creuser ses stigmates en attendant de se rire au
visage. Je voudrai tout te dire en trois baisers. Un à ta nuque comme un
figuier, un au poignet pour t’immoler, l’autre à l’aine pour te voir renverser
la tête.
Et le poème continue ainsi longtemps.
à s u i v r e…
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