Mais, revenons au football
qui, en faisant cesser les animosités entre religions chrétiennes dans la cité n’en continuait pas moins les sempiternels "fights" entre
villages en digne héritier du jeu de la soule qui seule savait colorer la grisaille
des jours d’antan et donner une personnalité et une âme à Castagne et Saint-Pargoire, un
jeux violent interdit à la Révolution française et dont la
beauté de nos filles ne fut jamais étrangère à leurs déclenchements. Quel dommage que nos révolutionnaires aient pensé à mal.
Alors, on fit comme dans
les temps anciens, et chaque village mit toutes ses énergies pour montrer aux
autres sa force et sa cohésion déjà par les entraînements et celui du dernier
jeudi d’avant match ne fut pas piqué des vers.
Dans les onze les ou 12
débits de boisson de Castagne-le Pont, 5 pour Saint-Pargoire-l’Ancien, les
langues se déliaient et s’avivaient sans s’aviner bien aidées par tous pastis* depuis
le Pernod, le 51, le Ricard, le Casa (le Casanis),le Jeannot, le Germain, le Berger
blanc ou jaune, le Duval (le seul véritable pastis de Marseille) et toutes
Mauresques (pastis à l’orgeat) , Perroquets (pastis à la menthe), Feuilles
Mortes (pastis à la menthe et à la grenadine).
- Norbert ne tiendra pas sa cage dimanche. Mais, oui ! Il a envoyé
bouler Kader.
- Et ta sœur. L’autre il lui a filé une de ces
engueulades. Pas plus. L'est pas né celui qui l'enverra bouler, le Kader.
*Eh, oui, René, tout comme Obelix, je suis tombé dans le jaune tout jeune. Le Pastis, je me le pratique à la perfection.
Dans les bars qui, dans le
temps qu’ils perdaient qui sa clique, qui sa fanfare après 1918 on avait fait
du ballon rond le roi de la cité et nul ne s’ennuyait à Castagne-le Pont,
encore moins au stade où on se bousculait pour suivre les entraînements de l’équipe
fanion pour pouvoir les commenter le soir à l’apéro.
Les dimanches ordinaires, à l’heure du match, vers les 15 heures lorsque la ville, ses bistrots et leurs terrasses se vidaient pour allonger la queue à la billetterie du terrain de foot, même quand la buvette se garnissait pendant la parties, tous ne faisaient plus qu’un seul entraîneur et un seul joueur. Et un seul arbitre partial et un seul spectateur râleur, tous deux sifflant et vociférant à toute faute adverse supposée. En toute bonne foi.
Les dimanches ordinaires, à l’heure du match, vers les 15 heures lorsque la ville, ses bistrots et leurs terrasses se vidaient pour allonger la queue à la billetterie du terrain de foot, même quand la buvette se garnissait pendant la parties, tous ne faisaient plus qu’un seul entraîneur et un seul joueur. Et un seul arbitre partial et un seul spectateur râleur, tous deux sifflant et vociférant à toute faute adverse supposée. En toute bonne foi.
A l’office du stade, le
dimanche, ni protestants ni de catholique, ni parti blanc ou rouge : que les
maillots verts des supporters inconditionnels de la petite cité de
montagne au nom prédestiné qui aimaient particulièrement la castagne* pour
émailler parfois les rencontres de quelques bagarres mémorables.
*La castagne, la châtaigne.
Et il y avait le taxi,
la grande gueule avec son acolyte Palan, le mineur de fond aussi chauvins l'un que l'autre, et encore de plus excités qu'eux. Qui n’aura assisté aux matchs entre
nos deux sœurs jumelles, Castagne-le-Pont et Saint-Pargoire-l’Ancien où les
choses tournaient toujours au Derby, le beau jeu faisant place à la gagne à
tout prix, cette personne n’aura rien saisi de l’âme de cette petite enclave du
piémont sud des Cévennes en limite des Causses.
Depuis un mois, la ville
entière ne parlait plus que foot, tous les espoirs et les énergies tournées
vers la confrontation avec le gros bourg de Saint-Pargoire situé à 7km à vol
d’oiseau de chez nous, 11 par la route, le match devant se dérouler sur leur
terrain, nous étions les visiteurs.
La mobilisation générale
avait été décrétée par tous les cafetiers des deux villages où même les paris
n’étaient pas clandestins et des cars réservés pour dimanche. L’excitation fut
à son paroxysme lorsqu’il fuita que les dirigeants adverses avaient proposé de
truquer l'affaire, alors tout le monde voulant y être, certains iront pédibus en
empruntant les tunnels de la voie ferrée, dont le plus long d’un kilomètre deux
cents. Aller-retour à pieds, le voyage pour rentrer à 21h en micheline trop
tardif.
Pour la petite histoire,
Castagne finissait champion de sa division. Cela lui suffisait. Pour la coupe,
nos dirigeants pesèrent sagement leur décision : on se savait suffisamment
forts pour attendre une année de plus pour placer cette coupe sur l’étagère du Café des Amis, siège du Castagne Football Club. Pourquoi ne pas l’abandonner
à Saint-Pargoire, dans une division inférieure
pour sauver sa saison désastreuse, pourquoi pas ?
Mais, si on acceptait de
perdre la coupe, la fierté de Saint Pargoire l’Ancien en prendrait un coup. Et
puis, encore fallait-il se décider avant la rencontre mais, tant qu’Edouard,
notre correspondant du journal local et Kader, l’entraîneur s’y opposeraient,
que faire ? Encore eut-il fallu que cet électron libre de Norbert notre
goal et l’Étoile du club acceptât de faire la passoire. Impossible. Et puis,
les paris dans les bistrots étaient faits. Et les cars retenus.
Curieuse idée que cette
idée là qu’une équipe puisse se déconsidérer en gagnant la coupe Gard-Lozère.
Ne la recevait-on jamais des mains de l’équipe perdante ? Dans le cas
présent, encore fallait-il piper le match. Curieux, mais pas tant que ça, le
jeu de ballon se laissant parfois pousser à de ces extrémités… extrêmes ?
Oui, c’est bien le mot.
En ce samedi
d’avant match, la devise de Castagne-le Pont fut comme toujours : "Tout pour ma gueule, rien pour les autres. Mais, vraiment rien !" car la parfaite victoire fait le vainqueur plus beau
et mieux aimable. Et pas de triche.
Pour
Saint-Pargoire l’Ancien, la Coupe ne pouvait lui échapper car : "Ayant Dieu pour défanse, Nous ferons
résistance". Si on veut. Même si Dieu nous comble de ses grâces, pourquoi ne pas l'assister un peu en trichant un peu beaucoup ? Et, si deux assurances valant mieux qu'une seule, alors pourquoi ne pas tenter le coup ?
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