Le gros village-rue de Saint-Pargoire l’Ancien grouillait de
monde en ce dimanche de finale de la Coupe Gard-Lozère à l’époque où les hommes
et leurs garçons s’endimanchaient pour aller au stade comme on se rendait à
l’église ou au temple et, pour une fois accompagnés de leurs dames et de leurs
filles.
Certains de Castagne-le Pont vinrent à pied par la
voie ferrée après onze kilomètres sous le soleil et un tunnel de 1,2km,
d’autres à vélos, en mobylettes, les plus nombreux en voitures, par la
micheline de midi ou les cars réservés.
Dans Saint-Pargoire l’Ancien se croisaient les hommes des deux villages qui finissaient tous par partager l'apéro dans les six bistrots puis par fraterniser comme ce n’est pas permis, leurs femmes et celles du village s'embrassant après la messe comme des amies se retrouvant. Pour le pique-nique sur la place du
monument aux morts, on vous offrait du pain frais par-ci, du fromage de chèvre
par-là, du vin du pays, des fruits :
-Je vous porte le pastis et l’eau. Non, ce n’est pas loin : nous habitons la Grand’rue.
Le match put débuter dans
une ambiance qui contrastait avec l’excitation qui avait envenimé les relations
entre les deux villes. Le score incroyable à la fin du temps réglementaire fut
de 4 à 4, on le sait. Revenons en début de partie jusqu’à la mi-temps où,
Castagne-le Pont, se baladant sur la
pelouse étrillait joyeusement Saint-Pargoire par 3 à 0.
La jeunesse des deux
villages par ennui, ou pour on ne sait quelle autre raison déserta le stade pour se mélanger en grosses bandes bruyantes par la Grand’rue désertée bordée de ses rangées de maisons-murailles entre les portes Basse et
Hautes, certains traversant la rivière par la poterne du Vieux Pont pour aller se
balader vers le quartier de la Gare quand d'autres remontaient l’aval de la
rivière pour se baigner. Le foot n’existait plus pour la jeunesse.
Heureusement car, au train
ou allaient les choses, notre équipe risquait de ridiculiser St Pargoire par un score
fleuve. Rappelez-vous maintenant la fraternisation pour l’apéro, et puis les femmes s'embrassant à la sortie de
la messe comme des amies de toujours, et le monument aux morts, et le
pique-nique, et la convivialité et voilà que curieusement, parce qu’à Castagne on
partageait les mêmes soucis quotidiens, qu’on se sentait
pareil, on commençait à se faire du souci pour l’équipe de Saint-Pargoire.
Au stade, après le repos
de la mi-temps, les jeux semblaient faits. Tous les spectateurs commencèrent à
plaindre le petit Poucet : on ne pouvait pas leur faire ça, les mettre
plus bas que terre. Non, pas ça.
Et voilà qu’à la reprise les deux ailiers de l’équipe de Castagne se
blessèrent on ne sait comment et la chance se mit à tourner pour le petit Saint Pargoire qui planta son premier but,
un tir imparable qui, raté au départ, foireux même surprit Norbert. Puis, la défense de Castagne prit l’eau par ses arrières
toujours à la traîne et, pas plus tôt la remise en jeu que voilà un nouveau
but. 3 à 2.
On avait l’impression que
Kader, notre entraineur amoureux du jeu italien avait enseigné le catenaccio à Saint-Pargoire dont toute l’équipe
protégeait ses bois en ne procédant plus que par des contre-attaques vigoureuses de
deux ou trois joueurs rapides mais qui se révélèrent souvent manchots, si j’ose dire,
leurs shoots en tirs de DCA fusant de partout mais hors de la cage de Norbert.
Si la défense de Castagne branlait dans le manche à l'attaque, que penser des demis qui jouaient chacun
son registre par des dribbles, certes de toute beauté mais inutiles car ils se
faisaient allègrement déposséder de la balle. Les consignes de
Kader? Oubliées :
- Les petits, tous au service de l’équipe. On forme un bloc. On n’encaisse
jamais.
Le seul qui sortait du lot
pour Castagne, notre goal tout à son affaire palliait à sa défense par un show
digne des plus grands gardiens de but. Aucun tir ne passait.
Ce fut vraiment une drôle
de finale où tous y perdaient leur latin, mais on s’en était accommodé :
s’était-on arrangé en coulisses durant la mi-temps ? Pour gagner ou pour
perdre ? Plus tard, les joueurs nous jurèrent qu’aucun
arrangement ne fut conclu entre les deux équipes, et on veut bien les croire
mais Castagne, comme par magie avait perdu son brio, fallait s’y faire. 3 à 3 pour un match nul, plus que nul.
Même en jouant mal,
excepté Norbert impérial dans ses bois, la messe était dite lorsque Castagne mit son quatrième but et la coupe lui revenait par 4
à 3 sauf qu'à quelques secondes de la fin du temps réglementaire, un arrière sur un corner fit une faute inacceptable dans sa
surface de réparation : pénalty.
Il nous restait encore la
bonne main de Norbert, sa mauvaise aussi et ses gants jaunes. On y croyait, sauf que notre gardien, feinté partit sur son pied faible. Goal ! 4 à 4. Incroyable.
L’affaire aurait mérité
une traditionnelle baston générale : et bien, non car les spectateurs des
deux bords semblaient satisfaits du résultat et on se congratulait. Et puis
maintenant que les équipes se retrouvaient à égalité, le suspense pouvait débuter et on espérait du beau football.
Et nous voilà parvenus
dans le temps des prolongations avec une défense de Castagne à la ramasse comme ce n’est pas permis et un Saint-Pargoire, pas meilleur en ses
attaques inefficaces. Les encouragements pour les phases de jeu tournaient même à la rigolade et les plus applaudis furent les plus maladroits. Un tir en chandelle, un autre hors cadre et c'était la liesse, un autre bloqué par Norbert et les sifflets fusaient aussi, lorsque
Saint-Pargoire s’offrit la victoire par un but d’écart, tous quittèrent le stade satisfaits, heureux même après le spectacle lamentable donné par les équipes, sauf quelques grincheux qui voulaient expliquer la défaite par un supposé
arrangement honteux.
Moi, ce que j’en dis, et
je pense que cela vous intéressera c’est que, tout compte fait ce qui se passa
pendant cette Coupe fit plus pour l’entente cordiale entre les deux villages
qu’aucun arrangement entre les équipes n’aurait pu faire …
Oui, mais de par chez-nous certains fâcheux et tous mécréants se plurent à dénigrer Saint-Pargoire et surtout Dieu qui s'étaient associés pour nous voler la coupe car, rappelez-vous :
« Ayant Dieu pour défance,
nous ferons résistance. »
Croire que Saint Pargoire l’Ancien aurait eu les moyens d'acheter Dieu pour l'inviter en 12ème joueur, c'est du grand n'importe quoi ! Tu le vois, toi le Bon Dieu se faire acheter au mercato par un boulot peu fatigant, déserter l'église le dimanche puis mettre un short à l'anglaise, des crampons pour filer sur le stade et jouer aussi mal ?
Croire que Saint Pargoire l’Ancien aurait eu les moyens d'acheter Dieu pour l'inviter en 12ème joueur, c'est du grand n'importe quoi ! Tu le vois, toi le Bon Dieu se faire acheter au mercato par un boulot peu fatigant, déserter l'église le dimanche puis mettre un short à l'anglaise, des crampons pour filer sur le stade et jouer aussi mal ?
Mais, admettons. Dans ce cas, reconnaissez que Castagne-le Pont avait aussi un dieu du stade à son service, notre Norbert.
Beaucoup en
furent persuadés : Castagne-le Pont avait bien triché un peu en jouant mal, Saint-Pargoire l’Ancien un peu plus avec Dieu en 12ème
homme.
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Relu et corrigé par Bernard qui
tient à conclure par ces mots :
Montélimar ce 8 août 2016
Mon Gilou, deux mots. Mon texte arrangé comme ça, pourquoi pas mais petite rectification d'importance : ce n’était pas une finale de la Coupe Gard-Lozère mais un match de Championnat, donc sans prolongations. En perdant ou même par un nul, Saint-Pargoire risquait la relégation, voilà pourquoi le jeu ne pouvait qu’être tendu. Suggérer qu'il n'y eut pas d'entente cordiale entre les équipes n'est que foutaises et compagnie. Quoique, l'entente, la cordialité et tout et tout, la morale surtout y trouvent leur compte, et c'est bien ainsi.
Par contre, si je ne retrouve pas tout à fait mon récit, il est vrai que, depuis ce jour les deux populations commencèrent à se fréquenter et nos garçons se liguèrent pour aller avoiner d’importance et sans vergogne les villages voisins dans les fêtes votives et autres bals des samedis soir où j’avoue avoir cogné plus qu’à satiété. Et reçu quelques bonnes branlées aussi en retour.
Mon Gilou, deux mots. Mon texte arrangé comme ça, pourquoi pas mais petite rectification d'importance : ce n’était pas une finale de la Coupe Gard-Lozère mais un match de Championnat, donc sans prolongations. En perdant ou même par un nul, Saint-Pargoire risquait la relégation, voilà pourquoi le jeu ne pouvait qu’être tendu. Suggérer qu'il n'y eut pas d'entente cordiale entre les équipes n'est que foutaises et compagnie. Quoique, l'entente, la cordialité et tout et tout, la morale surtout y trouvent leur compte, et c'est bien ainsi.
Par contre, si je ne retrouve pas tout à fait mon récit, il est vrai que, depuis ce jour les deux populations commencèrent à se fréquenter et nos garçons se liguèrent pour aller avoiner d’importance et sans vergogne les villages voisins dans les fêtes votives et autres bals des samedis soir où j’avoue avoir cogné plus qu’à satiété. Et reçu quelques bonnes branlées aussi en retour.
Je persiste et signe : 5 à 4 pour Saint Pargoire signifie qu’il y eut bien un
arrangement nécessaire pour préserver nos Derby en championnat. Sauf que, contre l’avis de l’entraîneur cette petite "amabilité" fit
grand tord au foot de Castagne.
Merci quand même et embrasse Ménie de ma part.
Bernard.
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Correctif : non, Bernard. Ce fut bien une match de Coupe. Certain même si je ne fus pas à Saint-Pargoire l'Ancien ce jour (j'en ai oublié le motif). La preuve fut que je perdis mon pari. Je donnais Castagne-le Pont vainqueur alors qu'il fallait donner le score à la fin du temps réglementaire qui fut 4 à 4. Donc il y eut des prolongations qui n'existent pas en championnat. Amitiés, et merci pour cet écrit. Gilles.
Bernard.
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Correctif : non, Bernard. Ce fut bien une match de Coupe. Certain même si je ne fus pas à Saint-Pargoire l'Ancien ce jour (j'en ai oublié le motif). La preuve fut que je perdis mon pari. Je donnais Castagne-le Pont vainqueur alors qu'il fallait donner le score à la fin du temps réglementaire qui fut 4 à 4. Donc il y eut des prolongations qui n'existent pas en championnat. Amitiés, et merci pour cet écrit. Gilles.
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