vendredi 23 mai 2014

Pourquoi tant de mots pour dire*?


Illustration de René BOUSCHET (R&B).

En un mot, comme en cent, tu es trop long pour Internet dans ton propos. Voilà ce que l’on me  surine à longueur de journée.

Aujourd’hui on ne lit plus, on survole. Même Fanny s'y met à en causer avec ses copines pour se plaindre que son chéri ne se fait long qu'étendu sur son ordinateur, sa bébête. Aussi, suggère-t-elle un palliatif réaliste :
- Tu n’a pas la tête aux longs amuse-gueule amoureux, qu’elle me dit, la Fanny, aussi, écris-moi de jolies lettres d’amour, toutes simples, en guise de préliminaires, et basta ! C’est possible, mon loulou ?
C’est possible mais bien plus fatiguant de tourner une jolie lettre d’amour que de titiller un téton, ma louloute, que je sache ! 

- Tu t’étales, tu t'étales. Mais, quel besoin as-tu de tant tartiner ? Essaie la sobriété, que diantre, dit René. Pour Youssef,
- Vois-tu, un épistolier se doit d’être fin, ce qu’on ne peut pas te reprocher, mais, tu es d’un long, comme en un long ramadan !
Merci, Youssef.

Pierrot, lui, ne me lit plus mais cela n’empêche qu’il aura toujours voulu mes histoires, que je teste sur mes amis, plus courtes. Surtout celles chantant mes belles coquines :
- Fais attention, Gilou, il y a des enfants.
Le seul qui estime que je suis trop court, ces temps-ci, c’est le copain masqué. 
(Le jeu de ce jour consistera à deviner lequel de mes ami joue à l’Arlequin, ce grossier excité. Celui qui trouvera le nom du copain masqué recevra un bisou de Fanny. Pour les filles, elles me feront le plaisir de passer par votre serviteur).
 
- Mais, tu dis quoi ? Tu dis rien ! Tu crois dire. Commence par dire que ce sont des abrutis, écris, gueule, chante-le. Parce que ce n’est pas possible de choisir un tel boulot et vouloir être apprécié. Quand à croire que tu les éduqueras, c’est impossible de faire évoluer ces glands, ou alors il y a longtemps que ce serait fait. Pourquoi ils ne changeront pas ? Mais parce qu’ils ne le peuvent pas, imbécile, vu qu’on les choisit tout spécialement pour leur abrutissement. 

Eh bien non, je ne savais pas, mais l’imbécile te remercie. Quand à Scipion…
- Tu parles trop. Faut rien te dire. Si tu la fermais de temps à autre, ce serait bon repos pour tous.
L’Africain aime mes tournures en bon françois, je le sais, mais me voudrait plus écrivain "normal".

Donc, parlons peu car il faudra se bien faire entendre en quelques mots. Nous décidons, dorénavant, d’exprimer la colère d'un court :
- Faites pas caguer !  En remerciement d’un petit plaisir, pourquoi pas un bref :
- Merci ! À réception du pyjama en cadeau de Noël, avec une expression rayonnante de bonheur :
- Mon Dieu, c’est trop… il ne fallait pas ! Quoique des loukoums, pour changer, eussent été... Exprimons aussi la contrariété d’un :
- C’est pas encore fini, tout ce bordel ?
Quant à notre propre jouissance que nous ne traiterons pas par-dessous la jambe, cela ne se pouvant, nous nous dirons, in petto :
- Après l’effort, le réconfort.

Mais toujours, quand la misère se met à pleuvoir sur le pauvre monde parce vous êtes tout contenu dans ce pauvre monde, il ne restera qu’à se consoler d’un :
- Merde ! Encore pour les même. Et c’est encore mon jour !
Ou alors, en toute détresse :
 - Qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu pour mériter cette chie-en-lit.
Oui, ici nous nous étalons car, comment dire la tristesse en peu de mots ? Impossible.

A s’exprimer courtement, n'espérez qu'une seule grosse déprime en retour. Ne trouvez-vous pas ? C’est pourquoi, je vous autorise à continuer à vous plaindre de toutes ces longueurs dans mes historiettes. Parce que mes longueurs me rendent heureux.
Non, non…ne me remerciez pas !
- Et que vive le long, le très long. Dimanche, aux européennes, votez Gilou le Long, le seul, l’unique qui s'étale et couvre si bien*, comme me le fais si justement remarquer Fanny chérie...
*mal dit, car il eut fallu "expliciter" ce "couvre si bien".
Pont d’Hérault, en doulce France, ce mois de mai 2014. Et, amitié aux importuns qui n’aiment que les histoires courtes et les pantalons trop courts qui laissent entrevoir leurs chaussettes trouées.

Non, non… ne me remerciez pas encore on vous aime malgré tout.

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