vendredi 15 février 2013

Éduquons, éduquons !...



De l’Instruction Publique à l’Education Nationale. Qu’est-ce que ce glissement, ce tsunami aura changé dans les mentalités et le savoir faire des Instituteurs, et autres Maîtres et Professeurs des écoles? Et quel en est le solde en matière d’instruction, de scolarité, d’éducation et de réussite?

Changer de nom, c’est bien… mais pour quoi faire? En devenant Professeur des Ecoles, l’Instituteur, le Maître traditionnel a-t-il changé sa façon de travailler? De solitaire dans sa classe, de maître seul à bord de sa section, a-t-il appris l’utilité et les bienfaits de l’équipe? Et cette équipe, amène-t-elle un mieux dans son travail, ses méthodes, la discipline et les réussites scolaires? Parce que c’est de cela qu’il s’agit. Et de l’élève! Avant tout!

Mais encore, l’échec scolaire inhérent à tout modèle d’instruction-éducation a-t-il régressé en changeant de raison sociale? Education, Instruction… Qu’est-ce qui change vraiment?
Vous me direz, on s’en contre-fiche, pourvu que nos enfants aient le bagage scolaire suffisant pour réussir leurs études.

Milieu des années 60, j’étais éducateur-scolaire. Nous récupérions des jeunes de 14 ans qui ne savaient ni lire ni écrire. Ils sortaient tous du système scolaire national. Des pas doués, quoi. Des laissés pour compte du système normal. Trois ans d’alphabétisation, de rattrapage scolaire et d’éducation à Morfondé, Villeparisis donnaient des résultats extraordinaires.
Il faut dire que nos méthodes étaient bien particulières et que nos Instituteurs et Educateurs-scolaires, sous la direction d’André FERRER, expérimentaient leurs propres méthodes pour les mettre en commun dans une équipe réelle, soudée, réactive, s’adaptant aux progrès et reculs des élèves. Les Maîtres étaient solidaires de l’enseignement et du suivi des autres Instits, les effectifs extrêmement restreints et les heures de cours réduites. Et les réussites des uns enrichissaient les autres.

Notre seule préoccupation était le progrès des élèves. Nos résultats intéressaient-ils le système scolaire général? Que nenni. Pourquoi? D’abord, parce que nous travaillions dans le secteur privé. Ensuite, parce que nous fonctionnions en francs-tireurs de l’instruction professionnelle et que nos méthodes ne pouvaient être adaptées à des classes de 30 et plus, avec des journées trop longues.
Nous étions convaincus que l’instruction ne doit pas fatiguer l’élève qui n’est pas une oie au gavage!
Nos résultats prouvaient que nous pouvions donner la même instruction avec le même niveau d’études que le système traditionnel dans un temps très court et avec des moyens plus que réduits. Et surtout, corriger les défauts du système scolaire traditionnel trop lourd.

En tant que spécialistes de l’éducation-spécialisée, nous avons toujours considéré l’Education Nationale et l’Instruction Publique comme des monstres incapables de se bonifier.
On fait des réformes, des réformettes, des études, des colloques, des enquêtes, des circulaires. Mais rien ne bouge parce que l’inertie de la machine est telle qu’elle ne peut que freiner. Même si tous les intervenants scolaires le voulaient, rien ne pourrait évoluer. Le danseur, en surcharge pondérale ne peut pas bouger son cul. Le maître de ballet n’y peut rien…

Changer de raison sociale ne fait pas avancer la résolution de l’illettrisme, de l’échec scolaire. Pourquoi? Simplement parce que l’Instruction est du domaine de l’art dans un rapport singulier Maître-élèves, tandis que l’Education tourne autour d’une notion sociale: les enseignants forment l’Equipe éducative. Mais une équipe éducative pour quoi faire? Eduquer, enseigner? Va savoir. Drolatique!

Pour que l’Instruction Publique soit efficace, il faut et il suffit de disposer de Maîtres. Et de tout mettre en œuvre pour parvenir à ses buts: donner une instruction suffisante et valable permettant de pouvoir progresser dans ses études. L’instruction est donc du domaine du solitaire, seul Maître à bord avant Dieu, (les hussards de la République étaient souvent athées) et la relation duelle Maître-élèves se situe dans un espace clos: la classe appartient au maître. Les élèves aussi.
Nous disions: 
-Mes élèves ont un appétit d’apprendre. Impressionnant! Et toi, ou en es tu avec tes élèves?
Le seul volet éducatif de l’instituteur se résumait à l’Instruction Civique accompagnée d’une discipline de fer à l’intérieur de la section.

Pour ce qui est de l’Education Nationale, la notion d’équipe est fondamentale. Seulement, une équipe est comme un bateau. Il faut un bâtiment solide capable de traverser les mers, résistant. Un bon équipage, un excellent capitaine. Des directives claires, des missions réalisables.
Seulement voilà, dans l’Education Nationale, comment travailler en équipe dans un système de fou dans lequel personne ne veut ou ne peut collaborer ou obéir, ou comprendre l’intérêt commun? Même avec toute la bonne volonté du monde, la solution est qu’il n’y a pas de solution!

L’Instruction Publique centre le rapport Maître-Elèves et ne s’en éloigne jamais. Il s’agit toujours d’instruction dans le sens de l’enseignement de matières nécessaires à la poursuite d’une scolarité harmonieuse. Il n’empêche que la formule a aussi ses échecs parce que tout réside dans les qualités du Maître. Son Art. Et, malheureusement, tous les Maîtres ne se valent pas.


A l’inverse, pour l’Education Nationale, le fondamental est l’équipe. Educative par principe. Si donc le terme d’éducatif se substitue à celui d’enseignement, on ne peut plus parler d’instruction, parce que l’on ne saisit pas ce que l’éducatif vient faire dans le système scolaire. A part de pallier les problèmes de discipline? Et quand les problèmes de discipline sont trop prégnants, l’enseignement devient impossible. L’art du maître ne sert plus de rien.

Convenons qu’éducatif et scolarité forment le mariage de la carpe et du lapin. Qu’en pense l’église? Prévoit-on des manifs contre ce type d’union contre nature? J’irai manifester, croyez-le.
Le rapport de base est donc faussé: les problèmes sociaux, éducatifs, souvent de l’ordre de la discipline piègent la relation enseignants-élèves. De plus, maintenir en classe des élèves qui ne reçoivent aucun bienfait de l’éducation nationale n’est pas la meilleure chose. L’éducation nationale a intérêt à créer des sections d’apprentissage valables pour ceux qui vomissent le système normal.

Vous me direz que, dans le secondaire, les élèves ont affaire à de nombreux enseignants à l’inverse du primaire. Je dirai : qu’il y en ait un ou dix, qu’est-ce que cela change? Pourvu qu’on ait des Maîtres. Et de préférence, de bons maîtres bien formés.

Que l’enseignant redevienne Maître de sa discipline et de sa classe. Qu’il tende vers l’excellence dans sa matière. C’est la condition nécessaire et suffisante pour que les choses aillent mieux.

Parce qu’aucune équipe éducative ne palliera jamais le mauvais maître.

De mes «Cévennes». Le 15 février An de Grâce 2013. Et que ceux qui me préfèrent plus primesautier veuillent bien m’excuser de ce petit en-cas que je m’offre. Promis. Je reviendrai au suçotage! A Dan!
Ndlr: l'Instruction Publique devient Education Nationale en 1932! L'équipe éducative apparaît par décret en 1990.L'instituteur devient professeur des école en 1989 et l'IUFM remplacera l'école de formation des maîtres.
De 1950 à 1958, mes instits étaient encore des maîtres modèle 1932. Puis, au collège et lycée, mes instituteurs modèle 1932 étaient devenus professeurs...
L'Education Nationale est longue à bouger son c.. je le disais!

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