mardi 19 février 2013
L'orgue de Barbara*...
Ou le cœur de Barbara…
Imaginez Barbara, grande dame souriante, toute mince avec de grandes et belles mains de pianiste. Moi, je n’aime que les petites mains, les petits pieds, les petits sourires, les petits… Enfin, les petites femmes, quoi.
Oui, mais non : Barbara en a vraiment besoin de ses mains pour sa musique. Une musicienne, une vrai, celle-là !
Oui ! Une organiste allemande que nous rencontrons, ma douce Fanny et moi, lorsque nous allons à la Grand Messe du Bayern voir le grand Franck Ribery et son équipe de rêve. Oui, car Fanny adore Ribéry et sa belle gueule d’ange déchu, et c’est bien ainsi !
Imaginez-là encore, Barbara, telle une petite chatte sur les genoux du Sphinx, au soleil d’Egypte. Sur son orgue. Tu vois ? Tu vois pas ? Si, tu vois ! Et elle, toujours à la limite de l’évanouissement d’avoir tant répété sur ses claviers, te fais bien comprendre qu’elle grande artiste elle est. Comediente !
Barbara et ses orgues. Ah, les instruments de la FRAUENKIRCHE. De München. Elle est intarissable sur les quatre orgues de FRAUEN…
-C’est Notre Dame, la cathédrale de Munich !
Donc, quatre orgues. L’un gigantesque, le Grand Orgue. Quatre claviers. Combien de jeux ? Elle me l’a dit. Ne m’en rappelle plus, un autre en bois,
-Oui, Gilles. Il existe des tuyaux en bois. Mais, tout le monde le sait…
Et deux autres ? Je ne me rappelle plus comment ils sont… ah oui, dont un positif.
-Ca, je connais, Barbara !
Et notre bavaroise voyage au gré de ses rencontres avec les orgues. Elle aime, comme Bach faire respirer puissamment son instrument, tous jeux ouverts dans une musique fantastique. Je crois qu’elle préfère les orgues aux hommes car, lorsqu’elle se met à caresser son clavier et que le piccolo joue seul, accompagné du pédalier, Barbara fait apparaître un ange du paradis, et alors on peut se passer de tout ce qui est humain. Surtout des hommes.
De trompettes du jugement dernier en roulements de tonnerre et fracas divin, tu peux l’imaginer en venant écouter, mieux, la voir jouer. Et la grande et frêle Barbara aime choquer en te sortant le grand jeu. Et modeste, elle te dit :
-Aujourd’hui, je n’étais pas très en verve, tu sais ! Je me sentais fatiguée.
Vilaine, va ! Mais, pas une note n’aura manqué. Et Buxtehude renaît lorsqu’elle vient jouer sur l’orgue d’Anduze, dans ce grand temple froid.
-Dommage qu’une note reste coincée par les chaleurs d’été !
Fanny me dit souvent :
-Dommage aussi qu’elle cause, Barbara.
Oui. C’est vrai que lorsqu’elle officie à l’orgue, elle ne parle pas. Et c’est bien !
Mais il est aussi vrai que, lorsque Barbara se met à te marteler ses claviers avec une violence inouïe et te caresser des pieds son pédalier, en aveugle tu as l’impression que Dieu parle à Moïse !
-Ah ! Gilles ! Depuis que je ne t’ai vu… Effectivement, nous nous étions rencontrés dans un bistrot de Munich cet automne.
-Un café ? Non, plutôt une bière!
-Mais, où étais-tu passé cet été ? Je t’ai cherché. J’étais au Vigan. Ta compagne m’a dit que tu t’en étais allé sans laisser d’adresse. Elle paraissait bizarre, alors je n’ai pas osé lui demander.
-Cet été ? Marie-Ange ne savait pas où j’étais ? Ben 4 mois de taule, qu’elle m’a offerts, c'tte blague.
-Ce n’est pas possible. Mais, pourquoi ?
-Oh, simplement parce que je l’avais giflé !
-M’enfin, Gilles ! Comment, simplement ! Tu trouves simple de battre une femme ? La battre !
-Oui, je sais. Même pas avec une fleur. D’accord ! Mais si je l’ai giflé c’est que…
-Non, mais tu te rends compte ? Gifler une femme, qui plus est ta femme, ça ne se fait pas !
-J’entends bien ! Mais oui, je le sais que cela ne se fait pas mais…
-Mais tu l’as fait et là, Gilles, je suis choquée !
-Ecoute, Barbara, tu es choquée mais moi aussi, il faut que tu comprennes…
-Bien sûr que je comprends que tu l’as battue. Non. Je ne veux même pas imaginer…
-Ecoute, Barbara. Je peux quand même t’expliquer que… Non ! Mais, non ! Ce n’est pas toi que j’ai battu. Et qu’est-ce que tu me fais dire. Non ! seulement deux petites gifles.
-Il n’y a pas de petites ou grandes gifles. Si ça avait été moi, je t’aurais… oui… tué !
-Donc, Barbara, tu ne veux pas que je t’explique…
-Ah, parce qu’on peut expliquer ce que tu as fait. Mais tu te rends compte…
-Bien sûr que je me rends compte. J’ai même fait 4 mois de taule pour mieux m’en rendre compte !
-Et tu ne trouves pas normal d’avoir été puni ? Tu oses te plaindre ? Mais tu la méritais, la prison !
-… !
-Tu trouves bien ce que tu as fait ?... Tu ne dis rien? Tu es fou !
-… mais, je…
-Et, de quel droit battre une femme. Sa femme. Tu devrais te faire soigner !
-Me faire soigner ? Tu crois ? Et elle… le feu au cul ! Faut pas qu’elle se fasse soigner ?
-Parce que son cul, comme tu dis si bien, il est à toi ? Tu en as l’exclusivité ? Malade, va !...
-… je ne te comprends pas, Barbara. De quoi veux-tu qu’on parle ?
-Mais, on parle d’une chose à ne surtout pas faire !
-Ecoute, ma chère : j’essaie de te faire comprendre les circonstances. Mais si chaque fois que j’essaie de t’expliquer tu répliques par : "Faut pas le faire !"... Mais, nom de Dieu, je sais qu’il ne faut pas faire ce que j’ai fait. Mais je l’ai fait !
-Et puis, tu commences à me courir sur le haricot. De quoi veux-tu qu’on cause, malade ! J’avais une femme bizarre, comme dit Américo, et il s’y connaît en bestiaux, mais toi alors, toi alors…
-Tu vois que tu es violent, Gilles ! Tu devrais te faire soigner.
-Allez, vilaine, va mourir. Et va te faire aimer par quelqu’un d’autre que moi ! Va tabasser ton orgue !
J’étais en train d’expliquer à Rolando ma dispute avec Barbara. Il m’écoutait de façon distraite…
-Donc, chaque fois que tu voulais circonstancier, elle répétait son récitatif sempiternel !
Il faut savoir que Rolando se targue d’en connaître un rayon sur la musique classique, le Bel Canto. Il n’est pas italien pour rien, le Monsieur…
-Quel récitatif, Rolando ?
-Tu as raison, Gilou. C’est plutôt le thème de la fugue que le récita…
-Attends, Rolando. Je te parle de gifles. Où vois-tu une fugue là-dedans ?
-Ne t’énerves pas Gilou-Gilou. Tu essayes d’expliquer à Barbara, et pas moyen. C’est ça ?
-Ah, oui. Elle a fini par me faire péter les plombs, celle-là !
-Ca me rappelle quand Bernard a essayé de t’expliquer qu’on l’avait chopé bourré…
-Oui, Rolando ! Fallait pas qu’il roule bourré.
-Ben, lui aussi m’a dit que tu étais un abruti et que tu répétais à chaque fois…
-Ouais, faut pas rouler bourré, Rolando ! Pas vrai ?
-Je sais, Gilou, mais lui voulait t’expliquer que c’était la première fois !
-D’accord, Rolando, mais c’est pas une raison pour rouler bourré au volant !
-Tu vois, mon Gilou-Gilou, tu sais faire l’abruti ! Tu ne trouves pas ?
-Rolando, tu es bien sûr d’être mon ami ? Je te trouve bien...
-... Moqueur ? Que nenni, mon gentil Gilou. Je n’oserais pas. Tu risquerais d’être violent. Et comme tu ne veux pas te faire soigner, ben… Je comprends la Barbara !
-Je comprends que tu te moques de moi, Rolando ! Allez, va mourir, vilain !
PS: Quand je la reverrai, ma Barbara, je lui raconterai le Pasteur-forgeron de Durfort (dans le Gard), un homme de Dieu qui, aux premiers temps de la Réforme, au XVIème siècle, battait sa femme comme plâtre. Et même que ses paroissiens sont venus lui demander de la battre moins fort !
Ah, les bons paroissiens de l’époque… la battre oui. Je veux bien, mais moins fort !
L’an de Grâce 2013, en février. Le Vigan-Sumène.
(131 jeux, le Grand Orgue de Frauenkirche, je crois).
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