dimanche 17 mars 2013

L'Arletta de Rolando*!


Que je te raconte, Gilou… 

Arletta. 70 ans. Une jeune septuagénaire, quoi. Pimpante, une tignasse de lionne de l'Atlas toute de noir teintée. Tu ne lui aurais pas donné son âge. Et puis, elle avait une coquetterie dans l’œil. Et moi, j’aime bien. C’est d’un charme fou !

Ah, ces italiennes qui parlent français avec ce petit cheveux mignon sur la langue. Et, tu sais bien, Gilou que, dès que j’entends chanter l'italien, ou ce joli zézaiement, j’adore. Et ma Gaby, elle se méfiait de sa copine Arletta… quoique, elle se méfiait encore plus de moi. Vrai de vrai. 
Et moi, fidèle comme un chien !

Arletta, l'était belle. Tu vois celle qui joue avec Burton… Oui, le Richard. C’est sa femme ? D’accord. Ben oui, celle qui jouait La mégère sur un toit brûlant. C'est pas le titre ? C'est plutôt une chatte ? Bof, on s'en fout...

Donc un film qu’Elisabeth Taylor jouait au cinéma. Bon ! Dire qu’Arletta lui ressemblait ? Oui, et même que pour rester mince, elle se bouffait des dragées Fuca. Et, ce n’est pas de la blague.
Je ne te raconte pas, Gilou, les histoires de chiottes avec Arletta… Mais, non, Gilou. Je n’ai pas l’habitude de blaguer !  Surtout avec ton cadeau !

Donc, je t’explique. Tu la vois Arletta qui aimait à faire la jeunette ? Paraître… wouah : mini-jupes plus que courtes, lèvres peintes rouge flashy, genre suivez-moi-jeune-homme, escarpins vernis hauts-talons, et grand sac à main. 
Ma Gaby lui disait souvent :
-T’as pas peur de te faire violer, hein ? 
-Pourquoi ?… non ! Mais, je me fais draguer. Certains me demandent même combien je prends. 

Et elle aimait plaire. Plaire, plaire ! Le pied. Et elle avait un jeune amant. Vingt ans de moins qui s’occupait de son gazon, parce qu’un gazon, français, anglais ou italien, faut s’en occuper, le tondre, l’arroser, mais surtout l’aérer, avec des souliers qui ont des pointes. Alors, tu montes sur le gazon d'Arletta, et va... et vient.... Et prends ton temps !

Mais un dimanche, avec ses teintures noir-assassin, elle a eu l’accident que Gaby redoutait. Les deux femmes, très copines, se racontaient tout. Et toujours, que je te chuchote, que je te rigole entre nous : 
-Jure-moi, Gaby. Tu ne racontes rien à Rolando… Non, non. Jure  ! 

Et moi, je me sentais de trop. Tu sais, ces rigolades entre femmes, tu es un mec et donc toujours de trop. Oui, ces parties de rire quand les femmes sont réellement heureuses. Entre-elles. Sans bonhomme.
Mais, là, Gaby ne rigolait plus quand l'Arletta s’est pointée à la maison, le regard éperdu. En urgence… 
-Bouge, toi, Rolando. Aux urgences ! Vite ! 

Avec ma R-16. Je ne savais pas pourquoi, en urgence. Ma Gaby, l’avait travaillé au Cinéma aux armées. On ne discutait pas les ordres de ma belle. Vrai de vrai ! Pourtant, les deux femmes se tordaient de rire. Arletta un peu plus que Gaby, mais, y avait de quoi !… Mais, c’était grave, non, mais sans blague ! 
-Fonce, Rolando. Vite, allez ! Dépêche, ça urge ! 

Vite, vite. Et l’infirmier aux urgences un grand black : 
-Une crème brûlée… Une ! 
Et le médecin de garde venu aux nouvelles, inquiet, mais avec de ces yeux que tu ne comprenais pas pourquoi il te regardait comme çà. Et Gaby, qui avait expliqué en aparté, et attendait. Et Arletta, mains au bas-ventre, inquiète…

L’homme de l’Art me semblait drôle, aux limites, l’œil coquin… Mais je ne saisissais pas le pourquoi. Mais limite, quoi ! Et Gaby qui me disait d’aller les attendre un peu plus loin. Et sa copine souffrant. Et moi, toujours dans l’expectative : 
-Est-elle en danger ?
Arletta notre amie partageait tout avec Gaby. Et ma chérie qui ne me disait rien…
-Non, chéri. Mais non, ce n’est pas grave. Ni sérieux. Un petit rien aux lèvres !
-Ah, bon... 


Heureusement qu’Arletta ne partageait pas tout avec ma Gaby. Et qu’elle se la gardait pour elle-seule cette manie de la teinture. Et son amant aussi. Parce qu’à son âge, c'était une ardente. Soixante-dix berges, faut le faire, non ?

Et l’amant, c’était mon copain à qui, moi, Rolando lui disais parfois : 
-Je me lui conterai bien fleurette, à l’Arletta. Pas toi ?
Et, l’autre grave de copain, 50 berges qui me disait, patelin : 
-Tu trouves. Elle t'émotionne ? Des fesses en goutte d’huile… Et puis, sa poitrine !  

Gilou, je te le dis. Dans la baise ? Les copains ? Tous des salopards. Y en a pas, de copains !
Ouais, et surtout toi, mon bel Yves ! Parce que l’Yves, et on peut dire qu’il y a prescription (il est divorcé), tout le monde savait, sa femme, sa voisine, Gaby. Enfin… Tout le monde. Sauf moi. J’avais l’impression d’être le cocu dans l’affaire. 
En loucedé, derrière mon dos ! (Par devant aussi… tu en es sûr ?).

Ah, oui, Arletta, si tu l’avais connue, tu l’aurais aimée. Italienne, certes, mais italienne avec une poitrine en oeufs au plat, je te l’ai dit, brune en beauté du diable et belle, comme j’aimais. Des cheveux coupés à la garçonne, pareil qu’en 1930, avec des accroche-cœurs. Et polissonne, quoi !… Un corps filiforme de mal nourrie, à cause des dragées Fuca. Je te l’ai aussi dit ? Enfin, bref… Et maigre que ça ne te donnait pas envie de bouffer sur le coup mais, je ne te dis pas : plus tu la regardais, plus tu la trouvais, comment dire… métable, non ?

-Quand bien même, parce qu'aveugle ou pas, tu voyais tout de suite que c’était une femme ! Une belle femme. D’Italie ! Un canon. A 70 ans bien sonnés. Celà t'espérançait !
Moi, Rolando je te dis que, si, quand tu vois une pomme et qu’elle ne te donne pas envie de se la manger, alors, elle n’est pas bonne. C’est comme les cerises qui, sans ver, ne sont pas goûteuses.
-D’accord, Rolando ! Mais, je ne comprends pas ! 
-Comprendre quoi ?
-Ben le ver… la cerise et la pomme… 
-Parce que tu crois qu’on peut tout comprendre dans la vie ? M'enfin, Gilou...

Effectivement, moi, Rolando, philosophe, je me pose la question : pourquoi, à 70 balais revenir des urgences ayant échangé chat contre dindon ? Je dis qu’Arletta était en avance sur son temps et qu’elle nous plairait bien aujourd’hui. 
On dit teinter, teindre ? Est-ce si important, tous ces mots ?
-Oui, mais ! Mais, Rolando, quelle couleur ? 
-Quelle couleur ?
-Oui, la teinte… 
-Nom de nom, Gilou, mais, on s’en fout de la teinte. Et tu n’écoutes pas… Les cheveux ? Noirs !

Oui, mais non, Rolando. Je voudrais bien savoir, le Yves ! Parce que la teinte, y avait une raison non?  Autrement, Arletta s’en serait bien passé…
-Passé, de quoi, Gilou ?
-Mais, de la teinte, c’te blague !

Cette fable est vraie, vécue. Rolando vous le jure. Au Café « des Cévennes », le Vigan, An de grâce 2013, ce 17mars mon cadeau de la Saint Patrice à Gilou. Faut ce qu’il faut. On dit : Merci, mon Rolando !

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