jeudi 14 août 2014

L'âne Hi-han*!...


Oh, comme souventes fois, manants viganais, vous me disiez :
- Holà... vous nous moquez. Et ce n’est pas bien !
Oui, tous vivons mal ces revers de fortune tant émaillés de blessures par ces rires étouffés derrière notre dos. Aussi, pourquoi ne pas rendre la pareille, cancanant à l’envie et, surtout, sans frein en bouche ?
Oh, comme ces rire persifleurs délicieux ravissent l'âme !

Les lois qui régissent l’humanité sont toutes contenues dans ce seul principe : de la fiance et de son pendant, la défiance qui tant fait souffrir, pleurer le trompé, réjouir le trompeur, et rire le voisinage.
Leurrer est chose la plus naturelle au monde. Quant à moquer son prochain, activité humaine par excellence, elle comporte le risque de la réciproque car, les banderilles sur la couenne du prochain, ce plaisir qui ne se refuse pas, peut vous revenir en retour de bâton. Tous fabriqués à l’identique, attention à ces retours de manivelle.

Monsieur Collant avait une maîtresse du vivant de Simone, sa vieille femme. Et alors, me direz-vous ? Grand bien lui fasse, cette entorse au contrat. Mais, le scandaleux abandonna la Chapelle évangélique pour la Salle Méthodiste.
Voyez comme de petits ennuis ménagers peuvent influer sur la composition des églises, toutes croyances en Dieu demeurant intactes. Voyez, encore, que nôtre Père, en sa grande bonté, accueille ce Collant évangélique pêcheur, chez nos méthodistes. 
Eh, oui, Dieu se montre toujours aussi étrange !

Comme les voies du Seigneur si étranges : il pardonne le cocuficateur mais oublie Madame Collant en profits et pertes !

Dites que Monsieur Collant, grand propriétaire, était un notable qui avait du temps devant lui mais se dépêchait de le rattraper, l'âge avançant inexorablement. Malgré cela, quand sa réputation fut impliquée, il sut que son plaisir devait être mis sous le boisseau. Se sentait-il ridicule, ou fautif devant ses frères en Jésus-Christ ? Il se chassa lui-même de la Chapelle. Mais, qu'avait-il besoin de la dénigrer, cette bonne Chapelle qu'il abandonnait ?

Disons : et alors ? Et, grand bien leur fasse, à lui et à sa maîtresse Denise. Quant à Simone, la femme Collant, peuchère, l’avait-elle mérité ? Non, pas du tout, sauf que l’était vieille. Et, en l'affaire, sachez que la vieillesse doit céder le pas à la jeunesse, inéluctablement.

Voyez comme, encore et toujours, les voies du Seigneur sont impénétrables : il pardonne le méchant cocuficateur mais oublie gentille Madame Collant qui n'en méritait pas tant!

Tel autre couple était protestant. Le mari, Moïse prit une maîtresse catholique bigote mais bien trop arrimée aux choses du monde. Disons encore : quoi de neuf docteur ?
Quoi de neuf  ? Mais, Anne-Pierre trompait son mari, l'Yvon au vu et au su de tout un chacun, et si près de l’Eglise et du Temple, si près que c'en fut l'objet d'un scandale parce que bien trop près de Dieu. Alors, nous pouvons imaginer l’ennui de l’abbé Ferrand, le confesseur d’Anne-Pierre; et du pasteur Abraham, l'ami de Moïse, cet éminent membre du Conseil Presbytéral.
Et, veuillez vous souvenir de Lise, la femme de Moïse.

Pauvre Lise, pauvre Yvon. Parce que toutes ces si belles choses des amours changeantes ne se résument qu'à des prénoms qui resteront à jamais gravés dans l'histoire locale. Chère Anne-Pierre, chers Moïse, Lise, Yvon et vous, illustres inconnus victimes des pulsions amoureuses de vos conjoints.

Un autre, riche de ses poules et son travail, rencontra sur sa route une gente dame dans le besoin, le besoin des as du vilain. Des as, ha , las ! 
L'Esclarmonde était protestante et veuve, malencontreusement. Lui, le François était catholique marié par le prêtre. Encore une fois, encore, oui, disons que si plaie d’argent n’est pas mortelle, nécessité fait loi en foi d'humanité !

Sachez que d'aucunes mauvaises langues alléguaient que l'Esclarmonde ne courrait pas après la bagatelle. Elle et notre François formaient un couple impossible, sans avenir aucun, et c'en était tristesse, quoique couple adultérin quand même. Parce que le François était marié, et à l'Eglise.
Disons encore : avaient-ils le droit de s’aimer, nonobstant la question d'argent ? Et alors ? Et de Jeanne la femme de François, était-elle spoliée de l'argent du ménage ? Mais pas que de l'argent ?

Le sieur François, au bonheur d'Esclarmonde devait, en plus de l'argent qu'il offrait à l'accorte dame et du plaisir qu'il s'accordait en cachette de Jeanne, son épousée, mettre des coussins sur le siège de sa Peugeot 203 camionnette pour apercevoir la route. D’accord, mais quand il voyait devant lui, il n’atteignait pas les pédales. Alors, là, que voulez-vous qu’il fasse ? Souder des prolongateurs de pédales ? Ce qu’il fit !
Ah, vous voyez, cette histoire ne se peut inventer mais, dans mon histoire, quel malheur car tous se moquaient de François : 
- T’es tout petit, trop petit. 
Peut-être, mais celui qui n’arrivait pas aux pédales avait été gratifié en âne, et la chose faisait le ravissement des copains, si je puis m’exprimer ainsi. Hi-han donnait ce plaisir aux dames, faisant parfois leurs délices. Mais, laissez-moi en douter parce que, Esclarmonde, peu portée sur les ânes, aurait pu dire : 
- Quand il y en a trop, c’est trop.
- Et ça te fait rigoler, pauvre naze ?*…
- Mais, non. C’est drôle, sans plus.
*Ndlr : naze de nez, de rien ou d'imbécile. Au choix, selon le texte.

Un jour, ses copains facétieux  (ils étaient trois gais lurons) le mirent à un défi insurmontable pour François. Hi-han accepta le pari de ces drôlets un tantinet  salopards : l’enjeu en était une caisse de Champagne. Il s’agissait de se taper trois dames consentantes, de bonne compagnie et de petite vertu. Le tout à la queue-leu-leu, si j'ose m'exprimer ainsi !

Et le bourricot en était bien capable, ce qui amusait la petite ville avertie, on ne sait par qui. Et tous apprécièrent à sa juste valeur le fol exploit qui se tentait. Les paris se prirent un peu partout dans les bars alentours et Dieu sait si notre petit patelin en comptait d'ouverts, des estaminets. Mais, c'était un temps avant que la télévision ne sévisse.
La ville se sépara en deux : ceux qui misèrent sur deux coups à la Hi-han, on les appela tout bonnement les Pan-pan. Les autres, les trois coups de queue d'âne se désignèrent les Ran-tan-plan.

Hi-han et les organisateur des festivités, copains de la classe, conscrits, quoi ! Problème de taille quasi insurmontable, la chose ne se pouvait dérouler céans, la faute à Marthe Richard. On dut diriger les travaux pratiques sur Nîmes, chef-lieu du département pour sacrifier au jeu de la grue, dans un de ces bons bordels encore bien officiant. 

Chez-nous, peuchère, les maisons de bonne compagnie et de mauvaise vie de nos joyeux pères de famille, bons pratiquants, oui, ces maisons dites joyeuses furent promptement closes dès la promulgation de la loi liberticide des amours de la chose dès1947, la faute en incombant, une fois n'est pas coutume, aux gendarmes trop pratiquants et à cheval dans leur unique Juvaquatre Renault.

Laissons François, en Hi-han, nous entretenir doctement de la triste affaire. Triste car il la perdit…
- Les copains, étaient dans la sambre (chambre), autour du lit. Je me nique la première. Enfin, ze (je) lui donne sa race. Ca rigolait ferme mais la fille elle en a vite marre. Je dis : "Apportez l’autre !" Ze la nique pareil et d’importance et dans la foulée… Là, les copains, y ricanaient zaune (jaune). Y faisaient même la gueule.
- C’est pas possible !
- Ben oui. Après les copains y m’amènent la dernière demoiselle.
- Tu lui as donné à elle aussi sa race...?
- Ben, non…
- Et pourquoi donc ?  Coquette avait molli ?
- Ca va pas, oh ! Ces salauds y me tiraient par les pieds. Z’ai pas pu la niquer. Alors, z’ai (j'ai) perdu mon pari.

Estimez cette historiette indigne de l’an neuf et, à l’avenir, je vous inventerai un conte à dormir debout avec des nains et une jolie demoiselle qu’on pourrait appeler… Blanche-neige, tiens !
Cela vous irait ? Une histoire vraie, celle-là !
Aux dernières nouvelles, la Miss aura porté plainte contre les 7 nains, suite à une tournante dans le parc communal des Châtaigniers. Les gendarmes de notre bonne ville du Vigan en rigolent encore.
Incroyable, non ?

- Mais, Gilou, le Hi-han et sa coquette, c’est vrai ?
- Que t’importe, si nous y avons pris plaisir ? Moi, à la raconter… et toi, à la lire. 
Et hi-han à l'avoir vécue ?

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