vendredi 30 décembre 2016

Il était une fois rien - 3

Voilà, voilà. Mon, histoire prenait forme dans ma tête. Bon, mais il nous fallait un nom à notre personnage qui fasse couleur locale, pas comme Stevenson... encore moins biblique, genre Elie, Aaron, Josué, bien trop protestants. A la rigueur Joseph, ça peut le faire. Toutefois, nous avons le temps de le baptiser, mais si possible en prenant bien garde qu'il ne périsse dévoré par les loups, le Ciel ne nous le pardonnerait pas. 
Pourquoi ? Mais parce que nous serons appelés par nos noms pour accéder au Paradis, voilà pourquoi !

Tiens, et si nous faisions venir notre ostrogoth d'Ecosse ? Il porterait un patronyme bien français, comme Robert Louis sans trait d'union, et ce afin d'améliorer notre récit. Il s'accompagnerait d'une gentille ânesse, une miniature pas plus grande qu'un gros chien à qui je me trouverais un beau nom. Et, que penseriez-vous de Modestine ? 
Robert Louis Stevenson et Modestine, voyageant en Cévennes, ça le ferait, n'est-ce pas ? 

Non, rien n'irait plus, aussi continuons, le conteur ne pouvant s'égarer longtemps, ni céder à la facilité, encore moins à l'imitation. Diverger, soit mais pour reprendre le sentier connu, le tenir et bien le suivre. Et puis, cette histoire d'ânesse, je ne me la sentais pas trop. Pourquoi ? Mais, bon sang ! Ne comprenez-vous donc pas ? Ne voyez-vous pas que la pauvresse n'aurait jamais pu passer le Col de la Séreyrède. Que faire ?

Certains, je le sens, les plus compatissants aimeraient la voir confiée au Relais de Poste de l'Espérou. Un abandon, est-ce de l'amour, de la miséricorde, allons donc ! On s'y était déjà attachés : impossible. D'autres, nature nous voyant braver les éléments s'attendraient à ce que je fasse donner les loups. Je pourrais toujours, aussi, que l'on ne m'y pousse pas. Mais non... la garder avec nous devenait une faute impardonnable car il ne nous restait plus qu'à sacrifier le pauvre animal pour sauver notre vie, à tout le moins celle de notre gentil inconscient, et là, voyez que le merveilleux foutait le camp.

Par ailleurs, reconnaissez qu'avec une ânesse dans le récit, mon histoire devenait un véritable compte de Noël à l'imitation de la Fuite en Egypte de Joseph et de Marie pour sauver le petit Jésus, ce Roi des Juifs qu'Hérode voulait mettre à mort. On pouvait garder Modestine jusqu'à l'abbaye du Bonheur. Mais non, définitivement non car pour sauver cette petite bête si attachante il nous faudrait un miracle. Attendu de la miséricorde divine? Allons donc, oublieriez-vous que je suis seul maître du jeu ? Et, même si je désirais ardemment la tenir en ma haute protection, je ne me sentais pas capable de la sauver, aucun de mes mots ne pouvant la tirer du péril. Dommage quand même.

Donc, je balançais n'étant pas encore parvenu à trouver tous les éléments de mon conte de Noël car, si je tenais bien le merveilleux, ne manquait plus que la Providence divine.
Et, pourquoi pas, à un moment, notre jeune homme n'aura-il entendu distinctement :

- Monte sur un arbre pour mieux te repérer.  C'était Satan !
- Non, surtout pas ! Les loups te repèreraient plus facilement. 

Mon Dieu, cette voix... Celle de sa novia ? C'était bien elle, à n'en point douter. Le bonheur ? Mais, il l'avait déjà trouvé avec elle, mais Bon Dieu, où pouvait donc bien se cacher cette "p... de m..." d'abbaye du Bonheur ? Non, non, ni ne jure, ni ne sacre ! Arrête-toi, l'ami et prête l'oreille. N'entends-tu pas une cloche qui t'appelle, remplissant tout l'espace pour couvrir le hurlement plus lointain des loups ?

Possédant le merveilleux dans le danger, avec la sauvegarde quasi-miraculeuse de mon jeune héros par mes mots vigoureux qui
le tireraient de la griffe et de la dent du loup pour le remettre sain et sauf dans les bras de sa novia, j'avais tous les ingrédients d'un conte de Noël qui se respecterait, vous pouvez imaginer mon bonheur. Et ma fierté d'avoir réussi là où tous doutiez de moi.

Donc, ravi de tenir une bonne histoire et content de moi... pas plus que d'habitude, me diriez-vous? je vous l'accorde, je remis délicatement mes doigts sur le clavier de ma Bébette, mon ordinateur, pris tout mon temps, soufflais longuement et... Mazette, qu'était-ce encore ?
Sur l'écran je découvris, sans trop y croire qu'un mot inattendu s'y inscrivait comme de lui-même : ...rien !" Rien. Point barre. Qui l'eut cru ?

Et, cela faisait : Il était une fois rien ! A ce moment précis, je sentais que mes yeux s'ahurissaient. Comment, il était une fois rien ? Etait-ce déjà la fin de mon conte de Noël, pas encore commencé que déjà terminé ?
Honnêtement, il est des moments qui vous mettent cul par dessus tête puis, on se dit :
-Et que t'importe ce tout petit rien ? 

C'est vite dit, mais lorsque transis vous parvenez tout juste à vous extirper d'un forêt profonde pour arriver sur le plateau avec l'abbaye du Bonheur en vue alors que vous frôliez la mort et que vous voilà revenu à la vie, on est en droit de s'étonner de ce tout petit rien quand bien même la vie ne tiendrait que dans cette accumulation de petits riens tous miraculeux qui en font la toute grandeur. Non, non, pas par l'accumulation mais simplement que, chacun leur tour, se faisant les marqueurs de votre "présent" en se combinant en votre mémoire devenaient un tout et, de votre histoire ces petits riens ne sont-ils pas la preuve éclatante que vous existez vraiment ?
Oui, je sais que c'est bel et bien dit. On ne peut mieux ? Mais, je le sais bien.

Reprenant mes esprits je me dis que de ce début foireux pourrait bien naître un écrit génial, proprement génial. C'était mon sentiment, alors. Alors ? Mon histoire à la merci de ce petit rien, tant pis je savais pouvoir faire avec, m'en accommoder.
Je m'inquiétais pourtant car je pressentais que ce petit rien allait me retarder et que ce joli compte de Noël risquait de se perdre dans la neige de la vallée du Bonheur si je n'y prêtais attention, ou que je ne pourrais vous l'offrir que pour la Noël 2017, bien après la ré-élection de François Hollande pour son deuxième mandat de Président de la République Française, autre conte de Noël en cadeau pour la même année.

Pour mon plus grand soulagement, l'arrivée de la lettre de Jojo sur la Gay Pride de Varsovie en 2006 me sauva sur le gong. Pour ma part, je refusais de considérer cette histoire de pédés en véritable conte traditionnel de Noël car, si le danger n'y manquait pas, même si le merveilleux s'y trouvait pourtant bien inscrit, la rencontre merveilleuse avec Margozara en faisant foi, cela suffisait-il ? Non, car il y manquait la providence divine à l'imitation de la Nativité, n'est-ce pas ? 
Et la Ménie qui se battait bec et ongles à me répéter que j'étais son obligé. Son obligé ?... manquait plus que ça !

- Je veux et j'exige ! Tu m'as bien entendue, mon petit Gilou. Tu me dois ça ! Mon cadeau de Noël !
Redoutable, la Ménie. Bien une femme, alors cédons. Ou, courage, fuyons !
- Mais, oui, Ménie. Ne nous énervons pas ! Certainement, Ménie, que ton conte de Noël, je ne peux te le refuser.

Il était une fois rien... Rien ? Non mais, dites-donc ! Ce n'est pas Dieu possible.
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  Je dédie ce conte de Noël à ma petite chienne, Noémie qui s'en est allée ce vendredi 30 décembre dans  sa dix-neuvième année. Nous l'aimions tant. Qu’elle soit appelée au Paradis par son nom.
Alléluia !
Elisabeth, sa maman et Gilles, son papa.

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