lundi 10 août 2015

Un épisode cévenol - 2

Comme un encart publicitaire. Dans le premier épisode, nous montrions qu'il n'est point de bonne médecine sans patience et tentions de comprendre pourquoi nôtre toubib ne présentera jamais d'excuse même pour les retards qui pourraient lui être imputés.

Avant d'aborder l'épisode cévenol que tous attendez impatiemment et qui nous rafraîchirait, nous aimerions comprendre pourquoi le postulat de la salle d’attente se posait comme le seul marqueur de l'excellence : bondée, alors nôtre docteur sera reconnu, non par ses confrères mais par ses patients comme un praticien hors pair... 
Voyez à quoi peut tenir la renommé d'un praticien. Incroyable ! Et pourtant, ne suis-je pas dans le vrai ? 

Le malade sera tenu responsable de tous retards car il est seule cause des engorgements des salles d'attente.  
-Mais, pourquoi consultez-vous ce docteur et pas son confrère ?
-Pourquoi ? Parce que... c'est évident, Monsieur. Demandez autour de vous !
-Ah,... c'est ce que je fais, mais si vous le dites, alors-là !... 
Constatez, en cette affaire sérieuse, la fragilité du raisonnement humain et, lorsque l'on se trompe pour sa santé, bonjour les dégâts !

Ton garagiste, imitant la combine de la salle d'attente te fait languir, et voilà qu'il te prend pour un demeuré !
-Je ne vous ai pas trop fait attendre ? Une urgence. Ah, et je ne vous garantis rien ! Dans un mois ? Oui, si j’ai le temps. Ou peut-être demain ? Ou peut-être demain.
L'amusant animal te chahute un peu : c’est un marrant qui imite ton toubib. Pardon ? Mais, une salle d’attente chez ton mécano, quoi de plus normal pour ta voiture malade de mauvaise carburation ? Ah, si elle pouvait parler, la petite chérie, elle la voudrait volontiers, cette salle d'attente des bagnoles !

La pensée magique du patient dans son rapport ambigu à son médecin emplit tous cabinets médicaux comme les croyants leurs églises et leurs temples.
Attention : aucune guérison ne se peut sans ce sorcier, le medicine-man. Et puis,  le plus ancien placebo, dont l'efficacité n'est plus à démontrer, n'est-il pas de croire que, seul, vôtre docteur peut vous guérir ?

Penchons-nous encore sur le praticien à la salle bondée : est-il docte, pas docte, allez donc savoir. Est-ce si important ?
Et puis, nous croyons que tous, en cette salle d'attente bondée, ne pouvons pas tous nous tromper sur ce praticien, en oubliant que c'est nous-même qui avons forgé sa bonne renommée. 

Cette croyance envers son médecin attitré se fait une panacée en même temps que la plus géniale opération publicitaire des patients au bénéfice de la médecine, étant entendu que toute la médecine commence et s'arrête à la salle d'attente du praticien qu'ils ont voulu excellent. Pourquoi? Mais, parce qu'il faut bien croire qu'on ne s'est pas trompé dans son choix et, qu'ici, il n'est question que de sauver sa vie. 

Redisons-le, ce n'est pas la foi en la médecine qui sauve mais celle qui se fonde en son médecin omniscient, l'Omnipotent. Et voilà que nous devons redevenir petit enfant pour guérir en nous laissant bercer par les paroles et la magie du père tout puissant.

A 17 heures 30, enfin le prof nous introduit en son cabinet qui bénéficiait d’une climatisation sur roulettes, avec le tuyau de rejet d’air chaud passant par l’entrebâillement de la fenêtre. Tiens, curieux système. Je n'y aurais pas pensé, moi.
Je le disais bien qu’on crevait de chaud à poireauter, nous autres, sans clim, et que le Professeur en était conscient. Ou si peu, ou peut-être pas, ou s'en moquait, mais nous ne voulons pas savoir : il est tout pardonné car il est le médecin que nous nous sommes choisi...

... et qui nous récompensera de nôtre attente patiente, (certains la confondant curieusement avec le fatalisme), par un long entretien à hauteur de 160e. Quant à ses attendus lapidaires, cadeaux royaux :
-Nous ne faisons pas de miracle et ne vous promettons rien, Madame !
Ben, voyons : pour 160 euro… pourquoi promettre ? Et pourtant Jésus faisait mieux pour beaucoup moins que cela. 
Plus de deux heures trente d'attente pour s'entendre signifier un constat d'impuissance, soit. Mais en tirer bénéfice ? Faut le faire, Prof. Et il l'a fait, le spécialiste à 160e !  

Entretien terminé, retour le long des couloirs désertés. L'attente nous a donné soif et nous nous attablons pour un chocolat (elle) et une bière sans alcool, je vous en prie (moi). Quelques instants plus tard la cafétéria ferme. On balaie, chaises sur les tables, « C’est l’heure de fermeture ». Il faut se dépêcher de boire, et partir.

Plus de 18h. Le soleil est occulté par une masse nuageuse noire :
-Dis, la belle, faut se grouiller.
Par un fait exprès, au même moment et comme si Panda était maîtresse des éléments, à l’instant précis ou nous montons en bagnole, une pluie de gouttes d’eau énormes, reste de grêlons ayant fondu dont il reste encore un noyau dur, nous accompagne.
-Faut vraiment se dépêcher de rentrer. On va déguster !

Sortie de Montpellier, une pluie drue comme vache qui pisse nous accompagne. Rapidement, tout le cheptel de la ferme des Mille-vaches se soulage en même temps, sans discontinuer, avec un de ces vacarmes sur les tôles de la voiture. On avait bien besoin de ça.

L’unique essuie-glace de ma Panda écope comme il peut. Le déluge. La fraîcheur s'installe, et la nuit se fait en plein jour sous l'averse. Surtout ne pas noyer le moteur ni faire de folies au volant, rouler feux allumés, tenir ses distances, ne pas sauter à roues jointes en fonçant dans les mares en formation comme le feraient des gamins.

Surtout ne pas caler pour rentrer plan-plan à la maison. Mais, Dieu, que ça marque mal !
-Oui, on avait bien besoin de ça, ma belle !
Et pas de radio dans l'habitacle.
A suivre…

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