lundi 18 juin 2012

Un procés spécial, Mr Substitut*!


Dessin de René BOUSCHET (R&B).

Lettre à Julie PATRICE, ma fille.
signé : E : 22352 -C : 2 (E = écrou. C = Cellule).

18 juin 2012. Ma jolie, here we are. Ta seconde maman a réussi à me faire mettre en taule. Bête comme elle est, c’est à pleurer de rire. Faut savoir qu’après mes deux gifles, son escapade à la neige avec son amant pour fêter ses 65 ans, elle m’a proposé de reprendre la vie commune et de lui pardonner. Le 6 février devant ma soeur et Américo. Pourquoi faisait-elle cela ? Va savoir !

En ce qui concerne la prison, pour l’instant, je suis avec un copain qui n’a mis qu’une gifle à sa femme : un an ferme. J’ai de la chance. J’aurais dû avoir deux ans car deux gifles !

On a la douche en cellule mais on me rassure : après quelques jours, je serai placé dans des piaules plus peuplées, sans douche. 
Mon moral n’est pas au beau fixe, surtout que le capitaine de l'accueil de la pénitentiaire m'a laissé espérer que j’aurai 8 mois à tirer. Même si je travaille* pour cantiner pour réduire ma peine.
Ici, je fibrille assez. Il fait chaud. Pas bon pour ma santé. Et le défibrillateur est à Pétaouch’nock.
*Ndlr : travailler en Maison d'Arrêt est quasi impossible pour les petites peines.

Ce 18 au matin, j’ai rencontré le substitut du Proc. A 10 heures au lieu de 9. Imagine qu’il faisait visiter le Tribunal à une maman et son fi-fils certainement délinquant.* Je suis convaincu que ce substitut a une formation d’éducateur. C’est pourquoi il m’a fait les gros yeux pour m’impressionner et faire peur au gamin. Ouh ! Que j’ai en peur ! Le Titi, lui n’a pas eu peur. L’avait pitié de moi. Les gendarmes aussi ont été abasourdis.
*Ndlr : à bien y réfléchir, cette "maman" serait-elle une greffière et son "fi-fils délinquant" le remplaçant de Botéro ? Va savoir ! M'enfin la jeunesse et la tête de délinquant, n'enlevons pas.

Le 4 avril, j’étais présent au Tribunal d’Alès. L’avocate d’office m’a repoussé violemment pour que je n’accède pas au Procureur. Tu voudras me rappeler qu’il y a là un gentil motif de Cassation. En effet, étant mon propre défenseur, j’avais les mêmes droits que l’avocate d’office.

Et pourtant, j'ai la preuve que j'ai été condamné le 4 avril et non le 16 mai 2012. Suis-je menteur, monsieur le substitut qui vous êtes ingénié à me foutre en taule ? J'ai deux preuves : un écrit de la Gendarmerie et une convocation pour le procès du 4 avril et un témoin de l'audience. Monsieur le menteur, faites moi procès.

Le substitut du proc m'a envoyé en taule parce qu'il a eu peur de mes écrits. J'ai eu l'impression d'être à un procès de l'épuration de 1944-45 : des journaleux ont été fusillés pour faits d'écriture. N'est-ce pas exact ? Faites-moi toujours procès s'el vous pli, missié.

Monsieur le substitut n’a rien compris. (J’ai dit Monsieur ? Tu en es sûre ? Ah, bon ! Comme c’est ballot !). Ce que je sais ? C’est qu’il ne m’aime pas et qu’il n’a lu ni mes conclusions, ni les lettres que j’ai écrites. Les a-t-il réfutées ? Pour celà, il faut savoir lire. Le peu qu’il y ait jeté un œil, il n’y aura senti que des menaces. C’est un bizarre, ce type : voila pourquoi je ferai toute ma peine.

Je languis ma Noémie, mon Rolando, mon Pierre, ma Carine, mon Américo, mon Christian, mes Claude et ma Claire, et toi et ton mec. Et ma 309, ma belle Peugeot.
                             Bisous, et à demain. 
                                                            Papa Gilles.

PS : Juju, quand tu m’écris, mets l’adresse entière. Sache que tes lettres sont lues (les miennes aussi). Tu peux donc faire passer des messages à l’administration. Ils sont sympa. Envoie-moi quelques t-shirts et cigarettes pour mon co-détenu. Il est pauvre. 
Ne viens pas me voir pour l’instant. Ca me foutrait le bourdon. Envoie un double de cette lettre à Carine pour son mec. Qu’il surveille mon courrier et l’ouvre. J’attends une lettre de la Clinique. Qu’il me donne le résultat.

Bisous à ta famille, Carine. Bisous à Rolando. Et à Noémie.
PS pour Rolando : Rendez-vous à la Saint Claude*.
*Ndlr : St Claude, le pays de la pipe si prisée.
                           _______________

Aux arrivants, 
                                  je te présente Romulus, roumain de 22 ans, deux gosses, marié à une française. Il avait arrêté l’alcool, ce qui était vrai : le blanc de ses yeux était clair. A pris deux mois fermes pour vol. Il ne comprenait pas cette détention. Il déprimait. Je lui disais :
-Profite de cette détention. Fais-toi soigner les dents... ! 
Il parlait mal français, mais "expulsion", il comprenait bien ce mot. Il avait peur d’être renvoyé en Roumanie.

Et puis en prison, il y a le médical, médecins et infirmière. Polis, vous serre la main contrairement aux services de la pénitentiaire qui vous refuse même le Monsieur. Ils sont rattachés à l’Hôpital de Nîmes : radio des poumons, tests sanguins, d’urine. Personnel très compétent. Plus les Assistance sociale, le SPIP.

Information ce jour sur le SIDA, les hépatites, les vaccins, la prévention. Piqûres ici : que des piqûres ! Moi, j’aime pas les piqûres. Je hais les piqûres !

Le 18 juin de l'an de grâce 2012.

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