mercredi 16 avril 2014

Le Conil de sir Cambronne* ! - 2


La vérité historique oblige au rétablissement de l'honneur du général Cambronne, Jacques, Etienne. 

Une seule et unique fois, s'étant laissé allé à dire une grossièreté, d'après ces Messieurs les anglais qui l'avaient bien mérité, sa réputation fut surfaite.  Moi, je dis : arrêtez d'insulter ce parfait homme du monde, toujours poli, jamais un mot plus haut que l'autre. 

Comparé au maréchaux de Napoléon 1er qui avaient toujours à la bouche la petite friandise si agréable à suçoter qui nous vient des lapins du fin fond du Moyen-âge, Sir Cambronne était d'une politesse exquise. Jamais, il ne prononça ce terme de conil que, pour la douceur de son pelage, on associa trop rapidement au pucelage des lapines.

Certains vous dirons que cette propension à la grossièreté des Maréchaux d'Empire proviendrait du fait qu'ils soient tous sortis du rang... Que nenni. 
Je demeure convaincu que nos actuels officiers, presque tous de l'ancienne noblesse*, avec leurs noms improbables, ces Mon(sieur le) Général de la Breloque, Mon Colonel de La Saumure, tous si collet monté, lorsqu'ils évoquent, avec la déférence qui lui est due notre Roi, père blanc et bon père François des peuples de France et du Mali réunis... 
 ... oui, disais-je, ces beaux messieurs doivent utiliser, sans nulle vergogne, ces termes de conil, conilhard, cuni en lingus vulgaire tout en se prenant pour les cavaliers de l'enfer et foudres de guerre à la Gudérian.
*On se demande comment cela se peut encore, en République, tous ces noms de nobles qui insultent à l'esprit de 1789, n'est-il pas ?

Comme le signalait si bien la réclame d'un fourreur de la Madeleine sachant parfaitement fourrer ces dames du monde, cette digression ne se propose qu’un seul but, à savoir que les mots de la vie sont notre essence même et disparaissent avec nous, même les très gros mots, mots-fureur... et mots-amour parfois en nos couches d'amour !

Camoëns le signalait déjà à l'époque : de chaque existence, il ne restera que nos dires pour raconter notre voyage terrestre, d’où l’impérieuse nécessité de leur recueil pour que nous restions à jamais en vos mémoires.
Mais alors, pourquoi vous souciez-vous de vos actions, bonnes ou mauvaises, il vous suffisait de faire collecter vos paroles, et même vos gros mots ?

Nous ne sommes que des films muets, à moins que… à moins que nous n’y mettions les sous-titres et les encarts indispensables au déroulé de l’action, plus ce pianiste accompagnant le film en nos anciennes salles obscures, pour faire jaillir la vie qui jamais ne s'accorda du silence. Il fallait ce bruit de fond de l’univers en certitude : ainsi, nous avons l'assurance que la vraie vie éternelle ne se peut que par le souffle de nos mots. Et tant que le vent les portera...

Avec l’usure du temps, nos tics du langage finissent vidés de saveur et de sens. Que  restera-t-il de nous ? Le souvenir de quelques bribes de mots :
- Ma parole, quel abruti ! Qu’est-ce que tu dis ? Ah les ortolans, c’est tra possible, mon fils ! Art’choun* ! Pardon? Mais moi, j’aime ma chatte ! Et si nous faisons une petite senterie ! Quoi ? Mais, que des cons ! (René parlant, plus particulièrement du Hollande’s gang)…  
*L’art’choun, friandise prisée en berbérie, (lorsqu’intact) et dégustée, telle moule fraîchement cueillie.

Vous étiez un excellent bûcheron dans la forêt de l’Aigoual ? Mais, on s’en tape. Vous maniez la rès en excellent scieur ? Vous ne la tibiez pas ? Bof ! Aucun intérêt.
La rès, est ce passant qui se manie à deux scieurs opposés. (Tiber la rès = Expression idiomatique cévenole signifiant qu’il ne faut pas tirer en même temps que l’autre scieur. Pourquoi ? Parce que si les deux tirent en même temps, la rès devient inutile, plus rien ne bouge, le travail n'avance pas et ça énerve…).

Eh, oui.. La vie use du technicolor et du parlant souvent grossier. Mouvements d'humeur, paroles d'amour courtois et de colère, couleurs d'argent, de vin et de pastis, senteurs de fleurs et de caca-bouda, ainsi va de toute vie… en y ajoutant les noirs et blancs de nos rêves de chaque nuit, notre cinéma muet, et le tout pour parler d'une jolie vie pas toujours polie. 
Devant les pyramides, que pouvait bien dire Buonaparte, artilleur de formation ? Soit une connerie, comme moi, ou parler en homme de guerre :
-  Avec la courbure de la terre, à combien de distance la vue s’avance-t-elle ? ou user d'un mot à l'emporte-pièce à la Sir Cambronne :
- Allez, on se lève de là et on se bouge le cul, bande de ...! 
- ... de cons, Mon Général ?
Mais, Napoléon Premier n’aura jamais pu prononcer :
- Soldats, du haut de ces pyramides, 40 siècles d’histoire vous contemplent. Impossible, incroyable. Mais pourquoi ? Mais parce qu'il n'était pas encore empereur. Des cons ? Pardon ?

La postérité par l’écriture. Sans les historiens, nul ne peut prononcer des phrases aussi bien tournées dans l’action, sans en enlever toute la gangue de grossièreté qui accompagne, toujours, le feu de la vie.
La voyez-vous, cette Retraite aux  flambeaux des grognards s'enfuyant de Russie, magasins de l’arrière pillés, maréchaux s’en disputant les restes comme des chiens et se traitant d’incapables, de gros cons et Napoléon ne pensant qu’à abandonner les débris de la Grande Armée pour rejoindre Paris ? Aurait-il dit : 

- Quels cons ? Ici, l'historien reste sans voix pour servir la gloire de l'Empereur. Par bonheur !
Et pourtant, "Quels cons !" eut été bienvenu, bien senti ! Réaliste !

A la Libération de Paris, les bons français chantaient ces mots, recueillis par les historiens officiels, en hommage à De Gaulle :
- Général, nous voilà, tu nous as redonné l’espérance, la patrie renaîtra, Général, Général nous voilà !
- Général, général... l'était pas Maréchal, Zohra la Grande ?
- Si c'est pour pinailler que tu m'interromps, merci bien Pierrot !

- Oh, si mes dires, même grossiers pouvaient servir ma gloire, même posthume, j'accepterais que l'on dise que mes amoures n'étaient pas si fantasques. Et ma vie pas si inutile, même si grossière elle fut par mes dires plus que par mes actions !
- Et, si tu me caressais de mots qui me montent du coeur au ventre, ici et maintenant, pour le meilleur et pour le pire ?
- Attends, Fanny ! 
- Oh oui, efforce-toi à l'excellence. Dis-mois ces grossièreté que j'adore ! Ces mots qui me font femme légère...
- ...
- Oh, Gilou-gilou, fais-moi ta reine de Saba.
- Oh, Fanny, ma yéménite, toi ma tendreté...
- Oh, mon roi,  baise-moi des baisers de ta bouche ! Et caresse aussi tendre petit conil d'amour !
- Fanny-Chérie, oh que oui, ooooooh que ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii.

Mais, chut… plus un mot, restons pudiques, car Bel Amour est si timide ! Et restez poli, je vous en conjure.
Ce 16 avril 2014, en souvenir de vous... oui vous, vous seule !
Proverbe suisse : Seul, le parler d'argent est d'extrême grossièreté !
Quant à Cambronne, qui ne fut jamais le grossier que l'on a dépeint, fallait quand même qu'il soit bien con pour demander aux anglais de tirer les premiers. Pourquoi ? Parce que !

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