samedi 12 avril 2014

Le Lapin du Vigan à travers les siècles* - 1


Peu d’animaux n’auront autant changé de nom sans jamais perdre leur livrée comme notre lapin-pin-pin.

Comme nous le savons tous, au Moyen-âge Lapin se nommait Conilhe et, parfois plus joliment, Maître ou Messire Conilhe car il représentait beaucoup pour nos familles de vilains serfs.
Imaginez la reproduction des lapins-lapines dans une année… incroyable. Durant des siècles, ce petit animal sera la seule réserve inépuisable en viande fraîche sur pattes. Voila pourquoi il n’était point besoin d’inventer le réfrigérateur qui attendra bien gentiment la surpopulation humaine pour laisser échapper ses gaz à effet de serre.

Nous sommes en 1080 après J-C. Dame Cunégonde, prénom à l’époque déjà en désuétude est la concubine de Jehan le vilain, dit le Couteau ( Prononcez Coutâo, à la romaine façon), tandis que la langue française se met en place, se libérant lentement de sa gangue latine.
A cette belle époque, pour les nobles, on ne se mariait pas, Monsieur. Non Monsieur !

Non, on ne se mariait pas ! On ne faisait que prendre femme, lorsque l’on était pauvre (prononcez paôvre…), oui parce que se marier avait toujours ces relents de combinatione, d’argent, de dot, de contrat, d’alliance, de richesse, de guerre et de paix, d’agrandissement de territoire, enfin que sais-je ? 
Serait-ce toujours ainsi à l’heure d’aujourd’hui, Monseigneur Bob évêque de Nîmes, Alais, Uzès et environs ?

Le mariage n’était pas pour tous, Bob. On allait voir la jeunette qui vous plaisait, on lui demandait tout bonnement :
-Tu veux ou tu veux pas. Si tu veux pas, tant pis, j’en f’rai pas une maladie*, puis, on s'emmenait dare-dare la damoiselle telle quelle, et seulement revêtue de sa chemise qu’on s’empressait d’enlever en quelque chemin creux après s’être éloigné de quelques pas de la demeure paternelle, et l’affaire était dite, consommée le plus rapidement possible avant que monsieur le Comte Dieudonné MURS de la Bastide d’Ambroisie n'ait eu l'idée même d'étrenner la promise de Jehan.
*Merci à Marcel ZANINI.

L’affaire de l’union faite et bien faite... ah, non mais dites donc ! Il convenait d'aller voir le bon gros Curé de notre grasse paroisse qui vous faisait de grands yeux-colère pour vous bien signifier que Monsieur le Comte n’avait pas apprécié la servile manœuvre.
Quelques deniers aussitôt discrètement donnés pour le dérider et, après quelques soupirs et un semblant de bénédiction, la messe était dite et l’union bénie inscrite en mariage sur les registres pour tous de la paroisse.
Et on se passait parfaitement de la Mairie, Cher Bob. Que de regrets, bon Bob de ne point vivre en ces temps heureux du droit de cuissage et de la prépondérance de l’Eglise Universelle, la Catholique ! En toute gestion religieuse des mariages heureux.

A cette époque bénie de l’essayage des pucelles par nos Maîtres, le mariage pour tous était interdit. Les bougres, réputés nombreux en Bulgarie, ne se pouvaient s’unir en France, sous peine de la hart (la corde, si vous préférez).
Cette bonne tradition festive de l'essayage en guise de cadeau de noce de nos Maîtres s’avérait nécessaire. L’Eglise ainsi la justifiait : il importait de connaître du sexe stricto sensus féminin, à tout le moins, de la mariée pour éviter qu’un mariage pour tous ne soit contracté par des hommes entre-eux. 

Non, non… ce n'était point une sinécure que d’être baron, comte ou vicomte. Qui peut réaliser l’harassement de notre bon Seigneur Dieudonné MURS en son Comté si vaste et tant peuplé de jeunes et jolies mignonnettes à marier qui pouvaient convoler à 13 ans et souventes fois avant 8 ans, avec dispense obligatoire de l’Eglise. Rassurez-nous, Monseigneur Bob, la dispense était bien obligatoire ?

Nous sommes toujours en 1080 dans le Comté d’Ambroisie avec Jehan et Cunégonde dans leur petite fermette, entourés de leurs charres* morveux, sales, tout en haillons. (*Les enfants sont toujours plaisanterie incroyable).
Donc, Jehan avait attrapé quelque conilhe de garenne en ses lacs disposés dans les communs du village. (Lacs ou lacets. Pièges rudimentaires).
-Jehan, mon conilhe tu le veux comment ? Faisandé… en saupiquet, en civet ?
-Surtout pas faisandé… je le préfère nature.


Mais, tout bouge, tout change. Le petit conilhe se transforme au cours des ans en conile, le h s’étant aspiré de lui-même.
Puis, quelques années plus tard, le e s’élide et il ne restera plus du conilhe que le conil, avec sa peau, son râble, sa viande et ses os, toujours bons à manger.

Ainsi, au fil du temps et de fil en aiguille, le conil se transformera définitivement en con pour la plus grande joie de tous.

S’avisant que le Conilhe avait le pelage doux, et qu’on aimait le caresser, on en fit des manteaux avec ses peaux cousues entre-elles. De douceur en caresse, de caresse en tendresse, de tendresse en amour, d’amour en jeux de main, de jeux de main en jeux de vilains, la nombreuse descendance de Jehan et Cunégonde fit du con un objet sexué, la France adopta le mot, s’en gaussa et les choses devinrent impossibles. 
L’Eglise s’en mêla et décréta que Messire Conilhe devenu le Con devait impérativement changer son nom pour sacrifier aux bonnes mœurs : le Con se fit Lapin et le Lapin devint… Non, ne me dites pas que c’est une histoire con !

Tout le monde a bien suivi la leçon du Maistre d’escole Gilles de Sumène, Pont d’Hérault et environs ? Le lapin s’était transmuté une bonne fois pour toutes en con tandis que la lapine devenue conne à son corps défendant, ne le demeurera pas, le mot la désignant tombant en quenouille. 

Depuis, et contre l’avis de l’Eglise, le Con et le Vit se marièrent, mariage pour tous plus que bénéfique pour l’Humanité et c’en fut si étrange que tous se demandèrent pourquoi on n’y avait pas pensé plus tôt.
Mais, comment faisaient les ancêtres de Jacquou et d’Henriette, Cunégonde et Jehan pour procréer, et surtout, comment appelaient-ils la chose ?

Oui, parce que… la voyez-vous, la Henriette hélant son Jacquou, toujours à Ambroisie en ces années 1728 :
-Jacquou, mon croquant, mon con, tu le veux comment !
-Ne dépiaute surtout pas ton con, mon Henriette. Etends-le sur un lit d’herbes fines et j’arrive te le gouster, en connoisseur !

Depuis, on sut qu’un Lapin pouvait toujours cacher quelque mignardise en sa fourrure. Et, voyez comme les choses viennent naturellement aux gens qui veulent s’instruire de l’Histoire de France !

A suivre : le conil de Sir Cambronne! 

Le Lapin à René BOUSCHET (R&B) : (*) Conilhe, conin, conil, con, La pine et même rab bite en anglish!*... on n'en sort pas.
*anglish néologisme de anglais (français) et english (anglais). 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire