mardi 15 octobre 2013

Una storia importante - 6


Toujours début juin 1940. Les allemands sont signalés partout. Paris voulut se protéger mais sera déclarée ville ouverte. C’est mieux ainsi.
Mon père, Umberto décide de faire comme la Rouquine. Fuir les hordes barbares fascistes. Il prend son vélo, une valise sur le porte-bagage et moi par-dessus, le tout, en équilibre précaire. Très précaire.
Et, nous voilà partis, nous traînant cahin-caha, Pappa debout sur les pédales, arque-bouté comme un travailleur de force pour faire avancer la lourde machine, pendant que deux travelos tout excité, supputant nos chances de nous en sortir indemnes, nous contemplent. Hilares. Les dix premiers mètres resteront dans les annales du XVème arrondissement de Paris: ce n’est qu’une longue et lente évolution sinueuse d’un vélo zigzagant tel un fêtard sortant d’une beuverie bien arrosée.
Vingt mètres encore, encore quelques tours de roue, encore et toujours avancer et, patatras… nous voilà par terre.
Au bout d’un troisième essai, nous décidons de tout rentrer à la maison, du vélo inutile, passant par la valise à remiser et des bonhommes défaits… chaque chose à sa place. Nous, chez-nous et les allemands au diable. Nous verrons bien ce qu’il se passera.
Et puis, comme les allemands sont signalés près de partout, autant rester à casa, comme dit Pappa.
Bravo, mon petit Pappa!

Pendant ce temps encore dans le monde…
14 juin 1940, l’armée allemande investit une capitale déserte, le gouvernement inutile se replie sur Bordeaux, des françaises et des français pleurent de honte, de rage et de désespoir.
Bravo les gars.

Dans la nuit du 16 au 17, le Président de la République Française Albert Lebrun charge le Maréchal Pérain, le vainqueur de Verdun de former un nouveau gouvernement.
Maréchal, nous voilà!
Bravo, les pioupious!

Nous voilà, Maréchal, et le temps passe. Des gens, rapaces, volent  leurs voisins d’en face. D’autres, en place, volent au secours des opprimés. En ses temps difficiles, chacun ses ailes. D’anges ou de démon.
La vie s’organise tant bien que mal… plutôt mal, pour les pauvres. Plus de pain, plus de viande, alors, elle demanda à la fourmi, sa voisine… Heu… non, pardon, je me trompe d’histoire. Les allemands confisquent tout. On les appelle les doryphores. La France est leur champ de patates qu’ils dévastent à loisir, sans vergogne. Les allemands confisquent tout.

Nous habitons un petit hôtel à putes… disons plutôt, un hôtel meuble… bien garni, quoi, avenue du Bel Air, à côté de la Nation.
L’atelier de mon père se trouve rue Picpus (au XIIème siècle, ancienne rue Piquepusse), au numéro 22, à l’emplacement, jusqu’en 1860, d’un hôpital militaire.
Tous les matins, je prends mon petit déjeuner au mastroquet d’en face. Il y a, à l’intérieur, cinq tables rondes aux pieds sculptés… ou en fonte moulée…, le dessus en marbre. Mais, quel luxe.
Derrière le bar, au dessus de la machine à café se dresse la photo d’un vieux monsieur à la moustache blanche, coiffé d’un képi de maréchal de France.
-Qui est-ce ? Si vous répondez vite que c’est le défenseur de tous les Français, que le Monsieur a fait don de son corps pour sauver la France, vous avez gagné!
Nous ne savions pas, alors, que la France offrait un séjour en camp, en Pologne ou ailleurs pour toutes les familles des juifs français… les femmes, les hommes, même les anciens combattants de la grande guerre et les petits enfants.
Alors, la France leur mentait pour qu’ils se tiennent bien tranquille jusqu’à leur départ. Comme s’il s’agissait d’un jeu national ouvert à tous sauf aux aryens, aux membres de la Milice, de la Police, de la Légion des Volontaires Français (LVF) contre le bolchévisme…

La Patronne de mon café-petit-déjeuner a un mari prisonnier en Allemagne et des beaux seins, autant que je puisse en juger à mon âge… oui, de gros seins épiés par deux baudruches clientes en mal d’amour qui ne pensent qu’à s’envoyer en l’air.
Pour les repas du midi e t du soir, nous allons, Pappa et moi «chez Bartoli», un restaurant italien sis avenue de Bouvines (victoire française du 27 juillet 1214), toujours dans mon quartier.

«Chez Bartoli », tout est médiocre. Une dizaine de tables rectangulaires aux pieds de bois, le dessus en tôle. Ce n’est vraiment pas la classe.
Par contre, derrière le bar, au dessus de la machine à capucino, se dresse une photo d’un gros monsieur, rasé de près, sans moustache et coiffé d’un chapeau à poils.
-Mais, qui est-ce, Pappa…
Pour en savoir plus, écoutez tous les matins de sept à neuf heures, RADIO PARIS ment, Radio Paris est allemand…

Bartoli, le patron du restaurant «Chez Bartoli» est italien comme vous n’êtes pas sans l’avoir deviné par son nom… et la Photo de Mussolini. C’est le copain de mon père. Mais, non… Pas le Duce. Mais, oui, Bartoli. Ils se sont connus pendant leurs études de doctorat (deux grosses têtes assurément).

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