lundi 13 mai 2013

À Phonème, belle maîtresse* !


Ndlr. Ce texte, pure imagination de l’esprit prolifique de Gilou, parle d’une maîtresse aimée et de la recherche de la méthode universelle des apprentissages. Une gageure !
Comme toujours on ne sait jamais ou Gilou veut en venir mais il finit toujours par y arriver.

Conseil pour ceux qui lisent en diagonale : ici, nous parlerons d’alphabétisation. Les parents, ont donné mandat aux instits, d’instruire. En conclusion, déclarons ce qui suit comme seule méthode valable : tout pédagogue doit amener l’enfant sur le chemin de l’école.
Comment ? Par le plaisir de l’apprentissage dans lequel aucun enfant ne restera sur le bord du chemin. Le chahut ne sera pas toléré dans la classe.  Le Maître trouvera sa méthode d’apprentissage qui deviendra obsolète à sa retraite, et n’acceptera que des conseils. 

Nous travaillions sans méthode, en notre jeunesse. Nous nous aimions à en mourir. Enfin, surtout moi. Et puis, tu t’es détachée et je continuais à travailler beaucoup, et j’ai été désolé, et je bossais toujours pour ne pas me noyer dans le chagrin et, dans le cas probable où je serai mort d’avoir trop aimé, tu n’aurais même pas pu suivre mon cortège funèbre qui aurait marché trop lentement pour toi, désinvolte, si pressée de te détacher de moi.
Alors, je suis tombé par terre et c’était la faute à Voltaire, bien sûr, le nez dans le ruisseau, et c’était la faute à Rousseau. Mais pas la tienne. 

Partie sans te retourner, tu papillonnais sans te rendre compte de ma misère, de ma solitude, faisant la belle, réussissant ta vie professionnelle tandis que moi, je ratais tout. Parce que tu ne m’avais donné qu’une possibilité, celle de désespérer, croyant à une vie meilleure avec toi et, pour finir, rater la marche et se retrouver presque happé sous les roues du train. Mutilé à jamais. Merci, ma toute belle Phonème
.
Et, pendant que je me morfondais, après avoir tenté de trouver des méthodes adaptées à l’apprentissage et à l’éducation, me gommant un peu plus jour après jour, respirant le moins possible pour ne pas t’enlever ton oxygène, ne pas gêner, me cachant, planquant mes gosses pour que tu puisses briller au soleil, tu écrivais des livres pour te rendre célèbre. La célébrité ! Ouah !
Et moi, j’appliquais plutôt des méthodes de gestion des groupes primaires et secondaire pour éduquer au mieux, copiant mes maîtres de l’époque. Quelques fois, brutalement.

Et tu as écrit sur les phonèmes… si tu savais ! Ce sont bouquins de paranos. Ta méthode est inapplicable parce qu’aucune méthode d’éducation ou d’apprentissage n’est valable sauf…
... sauf si l’apprentissage de la lecture, et de l’écriture était comme pour la philosophie : tu ne peut te regarder pédaler. Alors, explique : écrire et faire à la fois, tu fais comment ?
Les philosophes et les artistes n’écrivent pas sur leurs méthodes, en général. Pas cons, ils ont des disciples et des élèves pour ce faire.  Cela se transmet par l’exemple et non par des livres. Comme tout art.
Pas de méthode unique mais une pléthore de trucs adoptés par les instits. Point d’exclamation !

La méthode personnelle, sera appliquée au réel, au temps et à l’objet qu’elle se propose de poursuivre : instruire des enfants, leur apprendre l’écriture, et la lecture aussi ! 
Et alors, si tu la connaissais la bonne méthode, cela se saurait ! Depuis le temps que personne ne la trouve.

Apprendre à apprendre à apprendre. Tu voudrais apprendre aux instits ce qu’ils doivent apprendre pour que les enfants apprennent. Belle connerie s’il en fut. Si tu m’avais écouté à l’époque de nos amours, tu aurais appris une chose : l’instit doit devenir maître d’un art, son art. Il ne s’agit pas de méthodes. 
Le truc des phonèmes n’est qu’un truc, une connerie. Je peux t’en faire la démonstration quand tu voudras.

Une méthode que l’on voudrait universaliser n’est que le cache misère de l'incapacité de certains professeurs à réussir dans leur travail de propagations du savoir, et de l’enseignement. 
Voudrais-tu m’apprendre un style d’écriture ? Foutaises. Je te parle d’art, tu veux me donner des méthodes.
Des conseils seraient plus judicieux.

Un type qui subit du bordel en classe, userait-il d'une théorie sur les phonèmes ? Couillonnade. Apprend lui à gérer sa classe. Et s’il ne peut, mets-le à la porte de l’éducation nationale.
Un instit doit progresser avec sa classe, découvrir par lui-même les chemins de l’instruction. Ta méthode, encore qu’elle puisse t’aider… je dis : voire, ta méthode n’a aucune valeur pour gérer l’ensemble des problèmes liés à la gestion d’une classe. 
Phonème, toi-même.

Alphabétiser consiste non, comme tu sembles le croire à apprendre aux maîtres  des méthodes, mais leur faire comprendre que leur intelligence, leur humanité et leur amour de la chose bien faite et des enfants qui leur sont confiés fait plus que force ni que rage. Quant à tous ces instits et prof qui ne travaillent que pour la retraite. A ceux-là, tu n’apprendras rien. 
Phonèmes ? On dirait un gros mot.

Donne aux maîtres une bonne formation dans les disciplines qu’ils auront à enseigner, une bonne approche de la psychologie des individus et la gestion des groupes. Puis, mets les en doublure environ 6 mois avec l’instit qui part à la retraite. Alors, tu formeras des maîtres, ma petite Phonème.

L’art d’un instit meurt en général avec lui, ainsi que sa méthode pédagogique. Et c’est ainsi pour tous les artistes. Parce que l’instruction est un art. Difficile. 
Bien évidemment, tu peux suggérer des pistes aux instits qu’ils devront se charger d’explorer pour trouver leur voie.

Quant aux phonèmes ? Mon cul. Tu as utilisé trop longtemps la méthode globale et, pour revenir à la syllabique, tu voudrais inventer la méthode des phonèmes. Non mais dis donc, qui me parlait de la « photographie des mots » ? C’était toi, n’est-ce pas ?
La méthode globale, quelle connerie ! La méthode syllabique, c’est du pareil au même. Il n’est qu’une seule méthode : la méthode adaptée à chaque élève par chaque instit. C’est de l’art. Et comme pour tout art, faut être artiste et le maitriser.

Aujourd’hui tu es à la retraite, bonne instit et bonne formatrice. Mais, ta méthode passera. Un autre instit te remplacera et trouvera une méthode mieux adaptée pour ses élèves et l’apprentissage. Ainsi va la vie. 

Ta méthode, tu ne pourras l’inculquer car elle est retraitée comme toi. Eh, oui. Et, aucune expérience ne sert ni à soi, ni aux autres. 
Monsieur et Madame Batista, en Kabylie ont été mes premiers Maîtres. Leur méthode dans une classe unique du préparatoire au certificat d’étude consistait à se démerder comme ils pouvaient. Mais ça a marché. Qui dit mieux comme méthode ?
Puis, Jean Fesquet en France. Un fameux maître. Sa méthode ? Une gifle si tu avais le malheur de vouloir perturber la classe. Un de mes meilleurs instits qui aimait faire progresser ses élèves.
Et puis, Julien Plantier, dit Jules. Il donnait des cours du soir gratuits pour tous ceux qui voulaient passer le certificat d’étude, après sa journée de cours. Tu bossais pour lui parce que tu l’aimais. Sa méthode ? Va savoir. L'amour de son métier ?

Une seule méthode : Gérer le silence et la parole. Pas de perturbation des cours possible. Tout verrouiller. Aucun bruit perturbateur. Ainsi, nos Maîtres pouvaient enseigner en toute tranquillité.
Imagine Jules dans une classe moderne, bordélique. Je ne te raconte pas la tête qu’aurait le phonème perturbateur. Avec Jean, idem. Avec Batista et Madame ? Du pareil au même.

Mes Maîtres de ma petit scolarité jusqu’au collège, penses-tu qu’ils se posaient la question des phonèmes ? Leurs méthodes étaient parfois rugueuses, mélange de syllabiques et de globale, mais ces types se débrouillaient pour avoir la paix dans leur classe pour pouvoir officier. La méthode importait peu. Et ils n’étaient pas moins intelligents que toi.
C’étaient les maîtres du résultat à tout prix et de la satisfaction personnelle. La fierté d’être quelqu’un d’important dans la cité.

Dis-moi, chère maîtresse à la retraite, qui t’a appris à lire et à écrire ? Et quelles étaient les méthodes ?
Si tu trouves un phonème par terre, apporte le moi que je le mange en vinaigrette. Et, lorsque tu me lis, penses-tu qu’un instit phonémique aurait été un plus dans mon écriture ?

Je sais écrire et, à l'inverse du transfuge et réfugié politico-financier Depardieu qui l'a oublié, je remercie l’école de la République Française. J’aime l’écriture, je le dois à mes instits un peu brutaux, et aussi à Berthe pour sa philosophie et Dora pour le suivi des devoirs et à ma mère Fatima qui adorait me voir écrire, elle qui n’aura su que signer de son nom. 

Je dois mon instruction à des instits qui ont aimé leur travail et des femmes qui m’ont aimé et élevé.

Vends beaucoup de livres, belle Phonème, en cet an de grâce 2013, le 13 mai. C’est tout le plaisir que je te souhaite. Gilles.

Texte dans l'image: Ecole publique. "L'école communale est occupée" - "les chiottes aussi".

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire